Trump et les Arabes
Nul ne sait de quoi demain sera fait, mais le moins qu’on puisse dire, c’est que le monde arabo-musulman n’a plus le choix : face à la victoire de Donald, ce bloc désuni a désormais besoin d’unité face à Trump.
Une accentuation du chaos au Proche-Orient tomberait au plus mal pour les dirigeants des gouvernements arabes, ballottés entre une opinion publique qui enrage de voir ses chefs se coucher devant Israël et ses crimes de guerre, et l’obligation de montrer patte blanche à Washington.
Car c’est bien l’Oncle Sam qui mène la guerre d’extermination du peuple palestinien par soldats de Tsahal interposés. Pour éviter de sombrer dans le basculement géopolitique en cours, les pouvoirs arabes sont non seulement contraints de resserrer les rangs, mais aussi de trouver un consensus pour dire stop à l’Amérique.
Washington peut tordre le bras à un chef d’État vénal, une brebis galeuse qui accepte la servitude volontaire, mais ne peut pas se mettre à dos tout le monde arabe, chefs et peuple compris. Pourquoi évoquer une nouvelle crise qui s’ajoutera à la crise déjà là ? Parce que la clique qui tient le pouvoir à Tel Aviv ne s’est pas trompée sur ce qui attend les Arabes avec la montée de Trump.
Ce n’est pas pour rien que Benyamin Netanyahou s’est empressé de célébrer le « retour historique » au pouvoir de l’ex-président américain, poussant le bouchon très loin en qualifiant la victoire de Donald Trump de « puissant engagement renouvelé de l’alliance » entre Israël et les États-Unis.
Pour ne pas être en reste, le petit peuple hébreu a également plébiscité la victoire d’un chef d’État qui a fait, à l’époque, des cadeaux inestimables au gouvernement Benyamin Netanyahou, dont le moindre est d’avoir « contraint » plusieurs pays arabes à signer les fameux accords d’Abraham avec Israël, dont l’objectif avoué est d’enterrer définitivement le dossier palestinien.
Sans oublier le transfert de l’ambassade des États-Unis de Tel-Aviv à la ville sainte d’Al-Qods, un geste fort qu’aucun président américain n’avait osé faire auparavant. Dans la foulée, Donald Trump a aussi reconnu la souveraineté d’Israël sur la partie du plateau du Golan arrachée à la Syrie par l’État hébreu lors de la guerre de 1967.
Pour régler l’inconnue iranienne, Trump n’a jamais caché sa haine du pays des Mollahs et son retour à la Maison-Blanche, résolument anti-République islamique, ouvre la voie à une escalade militaire dans la région au moment où Israël et la République islamique sont engagés dans un bras de fer interminable entre représailles et contre-représailles.
Petit détail qui a son importance : c’est bien Trump qui a annulé en 2018 un accord sur le nucléaire iranien conclu par Barack Obama, que Benyamin Netanyahou n’avait cessé de fustiger, y compris lors d’un discours prononcé devant le Congrès à Washington.
Difficile de demander plus à un président américain pro-israélien et qui n’a jamais caché sa haine du musulman. En fait, on peut reconnaître au moins à Trump une qualité : il n’a jamais « trompé » les Arabes. Pas plus tard que le 16 octobre, lors d’une visite dans l’Iowa, il a annoncé de futures restrictions à l’entrée du territoire pour les étrangers venus de pays arabes.
En 2017, il interdisait d’ailleurs l’entrée de ressortissants de pays majoritairement musulmans aux États-Unis, un décret qui s’est finalement focalisé sur quelques populations, comme les Iraniens, les Libyens, les Somaliens, les Syriens et les Yéménites.
Ainsi, pour ne pas manquer notre rendez-vous avec l’Histoire, nous devons dépasser nos contradictions et nos faiblesses structurelles, sans nous refermer sur nous-mêmes. À nous d’imaginer comment obliger l’Occident à respecter le monde arabo-musulman et contraindre ses dirigeants à s’asseoir à table pour négocier la tête haute, car c’est l’Occident qui a besoin des Arabes et non pas le contraire.
Bien sûr, le piège est là pour ceux qui seraient tentés de céder aux sirènes de Moscou, auquel cas ils n’auraient pas compris que le choix entre les Russes et les Américains, c’est le choix entre la peste et le choléra, ou encore entre Charybde et Scylla.
« L’athéisme représente la même foi », disait un adage arabe.