Travailleurs marocains vs Consulat français : victoire des saisonniers
C’est un véritable coup de maître dont peut désormais se prévaloir et à juste titre l’avocate au barreau de Bordeaux Fatou Babou : arracher l’aval de la cour administrative d’appel de Nantes contre le ministère de l’Intérieur dans l’affaire des 22 refus de visas à des saisonniers marocains.
Ainsi, par un arrêt du 30 mai 2023, la cour administrative d’appel de Nantes a donné droit à l’ensemble des demandes du cabinet FB Avocat qui représentait les saisonniers marocains en rejetant le recours du ministère de l’Intérieur.
Pour ce faire, la cour administrative d’appel a retenu les arguments selon lesquels l’autorisation de travail avait été dûment accordée aux saisonniers marocains pour leur entrée en France. Et que, contrairement à ce que soutient le ministère de l’Intérieur, les saisonniers n’étaient pas tenus de présenter un contrat de travail.
La cour a donc considéré qu’« il n’y’avait pas de risque de détournement de l’objet du visa sollicité ; compte tenu des difficultés de recrutement observées dans le secteur viticole, le peu de qualifications que requièrent les tâches confiées aux saisonniers ne nécessitent pas de justifier de références professionnelles ; l’absence de liens personnels avec le pays d’origine ne constitue pas un risque de détournement de l’objet du visa à des fins migratoires ».
Pour rappel, l’affaire avait éclaté à fin 2021 quand l’opinion publique des deux pays s’était rendu compte qu’il y a eu un refus massif de visas pour des saisonniers marocains de la part du consulat de France à Casablanca.
En effet, alors que plusieurs entreprises françaises dans le secteur agricole ont sollicité des autorisations de travail pour recruter des travailleurs saisonniers en cette période . Il s’agit d’entreprises dans le secteur viticole agricole (ex: cueillette de fraises raisins de tout type de fruits), mais également d’entreprises dans le secteur de production laitière bovine et prestataires de services agricoles. Les autorisations de travail ont été accordées par la plateforme de main-d’œuvre étrangère spécialisée « saisonniers » et basée à Avignon. Ces autorisations ont été délivrées pour une durée maximale de 6 mois. Les contrats devaient débuter en décembre 2021.
Suivant la procédure normale, les services traitant les saisonniers marocains de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) de Casablanca ont convoqué les saisonniers à fin d’instruire leur demande de visa. Cependant, à la grande surprise des employeurs et des saisonniers plusieurs dizaines de visas ont été refusés. D’où le recours de plusieurs entreprises qui ont un réel besoin de main-d’œuvre étrangère au cabinet Fatou Babou pour démêler le vrai du faux dans une affaire qui coïncidait avec une brouille entre la France et le Maroc et où la menace de chantage aux visas avait été clairement formulée par des responsables français.
Pour le cabinet d’avocat, spécialiste dans les questions d’immigration, « il est indispensable de remédier à cette situation qui, aujourd’hui, porte préjudice aux entreprises françaises agricoles qui rencontrent de très grandes difficultés de recrutement de mains-d’œuvre et qui, en raison des refus, voient leurs entreprises en profondes difficultés financières. »
Ajoutant « qu’une réforme de la procédure de recrutement de saisonniers étrangers doit être impérativement engagée par le ministère de l’Intérieur. C’est une exigence imminente et indispensable. Cette réforme doit être axée sur la transparence du recrutement, mais également, sur la simplicité et la rapidité de la procédure ».