Tranquillité olympique à L’île-Saint-Denis
Depuis quelques jours, j’ai l’impression d’habiter à Neuilly-sur-Seine. À la veille du début des Jeux Olympiques, ma ville, L’Île-Saint-Denis (93450), qui n’est pas un prolongement de Saint-Denis mais une commune indépendante – on a une mairie, un gymnase, un stade et même une poste – est devenue un havre de paix. En plus d’un demi-siècle de présence ici, je ne l’ai jamais vue aussi calme.
Normalement, en cette période de l’année, comme dans de nombreuses villes populaires, c’est le temps des rodéos urbains, des barbecues musicaux qui durent jusqu’au petit matin, des embrouilles entre bandes de jeunes qui s’ennuient…
En ce moment, je peux même ouvrir ma fenêtre et entendre les oiseaux gazouiller ! Si ça continue, on va pouvoir la rebaptiser L’Île-Saint-Louis !
La cause de cette embellie ? L’île Saint-Denis abrite, comme ses deux villes voisines Saint-Ouen et Saint-Denis, une partie du village olympique. Elle a donc droit aux égards de la République, à une présence massive, visible, de la police, des bleus en képi qui se baladent à pied tranquillement. On était plutôt habitué, ici, aux cars de CRS et aux cowboys de la BAC !
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Pas de panique : je n’ai pas changé ! Je ne pense toujours pas qu’une présence excessive de la police dans une ville puisse régler les problèmes de délinquance. Surtout quand il s’agit d’une police répressive.
Il nous faudrait au contraire comme il y a quelques années, avant que Super Sarkozy, alors premier flic de France la supprime, une police de proximité aux services des habitants, capable de régler les problèmes en amont et ne plus laisser la merde grossir et débarquer juste après pour mettre des coups de matraque !
Et puis, il faudrait mettre le paquet sur la prévention, engager plus d’éducateurs et ouvrir des lieux permettant la rencontre et les échanges si on veut obtenir de vrais résultats, tangibles et durables.
Je sais de quoi je parle. J’ai connu les affres de la délinquance juvénile, repris de justesse par un éducateur local, Salah, qui avait eu la merveilleuse idée d’ouvrir une salle de quartier au pied de nos barres HLM, où nous avons pu jouir, nous enfants de prolos, à domicile, de la culture. Sans lui et son travail admirable, j’aurais sans doute viré Super Caillera.
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Hier, en faisant mes courses à la supérette du coin, j’ai croisé une mamie, 80 ans passés, une militante avec qui j’adore discuter. Elle a vécu toute sa vie à L’île-Saint-Denis. Elle aussi hallucine sur le calme soudain qui règne dans notre bourgade. Elle commence à me dire d’emblée : « Dommage qu’après les Jeux Olympiques, tout va redevenir comme avant ! « .
Puis, elle enchaîne, passionnée : « Tu vois Nadir, j’ai toujours voté à gauche. Jusqu’à mon dernier souffle, je voterai à gauche. Mais si aujourd’hui, les pauvres ici votent de moins en moins pour elle, c’est aussi parce que quand elle était au pouvoir, elle ne s’est pas souciée de notre sécurité. Mais Bordel, les pauvres aussi ont le droit à la sécurité ! »
Effectivement, je lui ai rappelé qu’en France, la sécurité est la première des libertés, selon la Constitution. Dans son article 1, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, précise d’ailleurs que « la sûreté fait partie des droits inaliénables et imprescriptibles de l’homme ».
Alors que la gauche pourrait être en mesure de gouverner la France à la rentrée, elle pourrait effectivement se pencher un peu plus sur cette question difficile. Bien entendu, il ne s’agit pas de s’aligner sur la droite ou l’extrême droite où le tout répressif est la panacée. Pour avancer et trouver des solutions, il faudrait pour cela déjà qu’elle se libère de ses dogmes. Et se rappeler que ce sont toujours les plus précaires qui sont les premières victimes de l’insécurité….