« Au milieu de l’hiver, j’ai découvert en moi un invincible été », une pièce à voir en urgence
Magistral ! Voici enfin une pièce de théâtre qui réconciliera toutes celles et tous ceux qui n'en peuvent plus de ces œuvres élitistes s’adressant à une petite minorité, inondant depuis de trop nombreuses années les salles nationales.
« Au milieu de l'hiver, j'ai découvert en moi un invincible été » (le titre est tiré du texte d'Albert Camus, "Retour à Tipasa") d'Anaïs Allais, qui se joue actuellement au Théâtre de la Colline à Paris (jusqu’au 1er décembre), est une pièce sensible, forte et efficace. Cette œuvre d’une heure vingt-cinq (on ne voit pas le temps passer) prouve qu’on peut-être hautement intelligible et extrêmement profond à la fois.
L’histoire
Lilas, la trentaine, se sait très malade. C’est peut-être pour cette raison qu’elle a ce besoin urgent de partir en Algérie, son autre pays qu’elle ne connaît pas, où elle n’a jamais mis les pieds, même si depuis toujours elle porte en elle la nostalgie de cette terre.
Elle est née en France; l'Algérie, c’est le pays des siens, même si les siens ne veulent plus en entendre parler. Comme sa mère, dont la mémoire est verrouillée à triple tour à chaque évocation du pays, ou encore son frère Harwan, qui ne comprend pas l’entêtement de sa sœur à vouloir rejoindre à tout prix l’autre rive de la Méditerranée. Il tente de l’empêcher de partir, refusant cette part de leur identité qui « ne les a jamais regardés en face ».
Parce qu'elle se met à tout lire sur l'Algérie, Lilas découvre que son défunt grand-père Abdelkader Benbouali était un ancien joueur de football. Pas n'importe lequel : illustre joueur de foot, cet arrière gauche est passé par L’OM, club avec lequel il a gagné la Coupe de France en 1938. Il s’est même retrouvé un jour dans une équipe dont l’Algérois Albert Camus était le gardien de but !
Lilas part en Algérie officiellement à la recherche de son grand-père mais on comprend qu’il s’agit ici d’une quête plus personnelle.
Peu de temps après son retour, la jeune femme meurt brusquement. Son frère Harwan occupe l’appartement de sa sœur pour mettre en ordre et déménager ses affaires.
Celui qui était pourtant fermé à cet autre pays, décide de créer ce lien manquant avec l’Algérie. Il demande alors à Méziane, un Algérien arrivé depuis peu en France, comme l’avait fait avant sa mort Lilas, de lui apprendre une chanson en arabe. La chanson que Lilas n'avait jamais réussi à réciter tout en entier.
Une belle chanson "chaabi" connue de tous en Algérie, (musique du peuple) qu'Harwan finira par chanter à capella avec brio et émotion à sa mère. Un des moments les plus poignants de la pièce. Sa façon à lui de continuer la quête que sa sœur avait entrepris, dans cette éternelle recherche d'identité.
Texte et mise en scène Anaïs Allais,
avec Anaïs Allais, Méziane Ouyessad et François Praud
Du 9 novembre au 1er décembre 2018
Du mercredi au samedi à 20h, le mardi à 19h et le dimanche à 16h.