Terrorisme, Libye et aides économiques au menu de la visite de Le Drian à Tunis
Le président de la République Kaïs Saïed et le chef du gouvernement Hichem Mechichi se sont entretenus le 22 octobre avec le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, en visite de travail à Tunis. Bilan d’une première journée très chargée.
Au Palais de la Kasbah, Le Drian se félicite de l’octroi de 100 millions d’euros à la Tunisie dans le cadre de l’appui des politiques publiques relatives aux réformes économiques. Il s’agit de la première tranche d’un prêt de 350 millions d’euros financé par l’agence française de développement (AFD). Le deuxième accord, d’une valeur de 38 millions d’euros, concerne une station de traitement d’eau à Béjaoua qui permettra de sécuriser l’alimentation en eau du Grand Tunis
En ce contexte marqué sur le plan national français par l’attentat terroriste des Yvelines, il a été question de terrorisme et d’extrémisme, un thème qui a prévalu dès l’entame de la visite de Le Drian.
Ainsi le président Kaïs Saïed a fermement dénoncé l’attentat perpétré contre Samuel Paty vendredi dernier, condamnant les commanditaires de cet acte « inqualifiables » et « affreux », tout en rappelant que « la Tunisie non plus n’est pas épargnée par l’extrémisme ». Une façon de rappeler la destinée commune des deux pays en la matière.
Saïed a cependant appelé à adopter « une nouvelle approche dans la lutte anti-terroriste qui consiste essentiellement à traiter les causes profondes » de ce fléau.
Divergences de point de vue sur la Libye ?
L’entretien à Carthage a par ailleurs été l’occasion, une fois de plus, d’évoquer la situation dans la Libye voisine. Le président Saïed y a mis l’accent sur le rôle de la diplomatie tunisienne qui a selon lui réussi à convoquer novembre prochain un dialogue entre les protagonistes libyens sous l’égide des Nations unies. « Les libyens doivent rechercher eux-mêmes les solutions qui répondent à la volonté du peuple libyen », a-t-il ajouté.
« Il n’est pas préférable à ce stade du conflit libyen de recourir aux interventions d’autres pays, cela risquerait de compliquer la situation », a-t-il dit, réaffirmant que la Tunisie s’oppose catégoriquement à « la division de la Libye ». La phrase, dans le style tout en allusions de Saïed, fait déjà réagir en Tunisie où certains observateurs font remarquer le manque de pragmatisme du président qui refuse de voir une réalité : l’intervention de divers acteurs, grandes puissances régionales et internationales, est aujourd’hui un fait établi.
De son côté plus consensuel, le ministre français a fait observer dans une déclaration à l’issue de l’entretien, que « la France tout comme la Tunisie, considère qu’il n’y a pas de solution militaire en Libye », et que seul un dialogue inclusif pourrait conduire à « une solution acceptable et durable en dehors de toute ingérence étrangère ». Le Drian a néanmoins mis l’accent sur l’importance du rôle des pays voisins, étant donné qu’ils sont les premiers concernés par les risques que fait peser cette crise.
« Les pays voisins de la Libye peuvent jouer un rôle stabilisateur auprès des acteurs libyens, ils ont un intérêt véritable à la stabilisation de la Libye », a-t-il conclu.
Signature de deux accords clés
Le chef de l’Etat s’est félicité de la signature de deux accords cadres économiques liés au suivi des recommandations de la visite d’amitié et de travail qu’il avait effectuée à Paris en juin dernier, indique la présidence de la République. D’autres projets avaient été examinés avec son homologue français Emmanuel Macron : le projet de la cité médicale de Kairouan et celui du TGV nord sud tunisien.
Le ministre français a fait savoir que la Tunisie réceptionnera dans les tous prochains jours des aides médicales d’une valeur avoisinant les 500 mille euros, dans le cadre de la coopération bilatérale dans la lutte contre la pandémie de Covid-19, en sus de la construction d’un hôpital à Gafsa.
L’entretien a également porté sur les préparatifs en cours pour l’organisation du 18e sommet de la Francophonie prévu pour 2021 à Djerba.
Le Drian a enfin salué l’état de la coopération entre les deux pays au Conseil de sécurité des Nations unies qui a récemment abouti à l’adoption à l’unanimité de la résolution onusienne n°2532 exigeant la cessation des hostilités entre divers belligérants pour mieux faire face à la pandémie Covid-19.
Il a à cet égard appelé à poursuivre la coordination entre les deux parties s’agissant des questions régionales et internationales d’intérêt commun, en particulier durant le mois de janvier prochain au cours duquel la Tunisie présidera cet organe onusien.