Les vérités de Mohammed VI

 Les vérités de Mohammed VI

FADEL SENNA / AFP


 


Le Roi Mohammed VI a adressé un discours qui fera date à l’occasion du 63ème anniversaire de la Révolution du Roi et du Peuple. Décryptage en quatre points.


 


Algérie/Maroc


Le grand malentendu


L’Expression ne s’est pas trompée dans l’analyse du discours prononcé samedi dernier par le souverain marocain. Le journal algérien qui a repris de larges passages de l’allocution royale a noté que les déclarations du roi «  ont fait chaud au coeur des Algériens qui l'ont chaleureusement applaudies et abondamment commentées, de façon très positive ». Le discours qui fait référence à la date historique du 20 août 1955 qui a scellé pour l'éternité le destin des peuples algérien et marocain revient sur une période clé de l'histoire qu'ont en partage les deux pays où « une figure emblématique de la résistance à l'occupation française Sidi Mohammed n'avait pas lésiné sur les moyens pour soutenir la révolution algérienne ». «De plus, la Résistance marocaine a apporté son soutien matériel et moral à la Révolution algérienne, en butte à une campagne violente engagée à son encontre par les forces coloniales qui entendaient la réduire à néant avant même qu'elle ne fête son premier anniversaire», a souligné Mohammed VI. Dans quel objectif? «Ce soulèvement et cette solidarité ont contribué à redonner vie à la Révolution algérienne. Tant et si bien qu'à terme, les deux pays ont joué un rôle majeur dans la libération et l'indépendance de l'Afrique.», explique le souverain marocain dans une sorte de main tendue aux dirigeants algériens au moment où les bruits de bottes à la frontière avec le royaume se font de plus en plus insistants.


 


Haro sur l’Islamisme radical


C’est une position claire, nette et tranchée que le souverain chérifien a exprimée dans son allocution. C’est en tant que commandeur des croyants que Mohammed VI a condamné sans équivoque les terroristes qui agissent au nom de l’Islam et appelé à un front commun pour contrecarrer le fanatisme des djihadistes.


C’est d’ailleurs la première fois qu’un dignitaire religieux dont la voix est écoutée au sein de l’establishment musulman s’attaque aussi frontalement aux islamistes radicaux leur déniant le droit de se réclamer de l’islam. « Les terroristes qui agissent au nom de l’Islam ne sont pas des musulmans et n’ont de lien avec l’Islam que les alibis dont ils se prévalent pour justifier leurs crimes et leurs insanités. Ce sont des individus égarés condamnés à l’enfer pour toujours. Est-il concevable que Dieu, le Tout-Clément, le Tout-Miséricordieux, puisse ordonner à un individu de se faire exploser ou d’assassiner des innocents ? Pourtant, l’Islam, comme on le sait, n’autorise aucune forme de suicide, pour quelque motif que ce soit », a tenu à préciser le chef religieux.


 


L’Afrique : partenariat win-win


Le roi du Maroc ne rate jamais l’occasion de fustiger le colonialisme. Dans ce discours, il ne déroge pas à la règle et rappelle les méfaits de ce dernier sur la santé politique et sociale des pays africains affligés par « le sous-développement, la pauvreté, de l’émigration, des guerres et des conflits » par ce Moloch qui «  a pillé les richesses du continent, hypothéqué les potentialités et l’avenir de ses citoyens, entravé sa marche vers le développement et semé les graines de la discorde entre ses Etats ».


Mais en dépit des grands dégâts que le colonialisme a occasionnés dans ce continent, le chef de l’état est convaincu que « l’Afrique est capable d’assurer son propre développement et de changer par elle-même son destin ». Dans cette lueur d’espoir, la coopération sud/sud apparaît comme un véritable remède : « Nous ne considérons pas l’Afrique comme un marché pour vendre et écouler les produits marocains, ou un cadre pour le lucre rapide, mais plutôt comme un espace d’action commune pour le développement de la région, au service du citoyen africain » a martelé Mohammed VI.


 


Les MRE, boucs émissaires commodes


Il n’a pas échappé au roi que les marocains à l’étranger, au moment où la machine économique est grippée en Europe et où l’ascenseur social est en panne, sont désignés à la vindicte populaire par des politicards populistes qui surfent sur les peurs du moment. Dans son discours, le souverain a appelé les Marocains résidant à l'étranger, « à préserver la bonne réputation qui fait leur notoriété, à s’armer de patience face à cette conjoncture difficile, à s’unir et à être toujours en première ligne parmi les défenseurs de la paix, de la concorde et du vivre-ensemble dans leurs pays de résidence respectifs ».


 


Abdellatif El azizi