Une initiative pour aider les étudiants tunisiens en France
Souvent loin de leur famille, les étudiants tunisiens se retrouvent sans ressources à cause du confinement. Une belle initiative leur permet d'obtenir un peu d'aide.
Ils sont venus poursuivre leurs études en France, ont quitté leurs foyers, leurs familles et bien souvent leur principale ressource venait d'un petit job. A cause du confinement observé dans l'Hexagone pour combattre la pandémie de Covid-19, nombre d'entre eux ne peuvent plus travailler, se retrouvant sans ressources.
En collaboration avec le Consulat et l'ambassade de Tunisie à Paris, la fondation de la Maison de Tunisie a mis en place une initiative afin de venir en aide aux étudiants tunisiens. Aide financière, logement, alimentaire et même rapatriement, Tahar Battikh, directeur de la fondation de la Maison de Tunisie mais également à la base de ce projet, revient sur cette initiative.
LCDL : Comment est née l'idée d'un tel dispositif ?
Tahar Battikh : Je ne suis pas juste directeur de la Maison de Tunisie. Je suis également directeur de la mission universitaire et éducative de Tunisie à Paris, je suis responsable essentiellement des étudiants tunisiens en Europe de l'Ouest. Donc dès que ce problème de Coronavirus est apparu, j'ai commencé à avoir des appels de détresse d'étudiants, de partout en France et au-delà.
Autour du 20 mars, j'ai donc pris l'initiative d'ouvrir un compte afin de récolter des dons au nom de la Fondation Maison de la Tunisie parce que c'est une fondation à utilité publique [permettant aux donateurs de récupérer 75% de la valeur des dons lors de la déclaration fiscale, ndlr]. J'ai commencé modestement en aidant quelques dizaines d'étudiants. Puis j'ai créé une plateforme électronique pour que les étudiants en détresse puissent s'enregistrer pour demander de l'aide en prouvant bien qu'ils ont le statut d'étudiant. Actuellement, j'ai 3700 étudiants inscrits. Et le volume des dons que j'ai pu récolter est de près de 160 000 euros. Il y a eu un mouvement de solidarité incroyable. Nous avons pu donner 100€ à environ 1600 étudiants.
Mais il y a également des gens qui nous ont dit qu'ils préféraient parrainer des étudiants. Donc nous avons créé une plateforme pour permettre aux personnes de s'enregistrer en tant que parrain et, petit à petit, nous avons pu avoir 500 parrains, répartis sur tout le territoire français.
Outre les dons d'argent, vous recevez également des denrées alimentaires. Comment organisez-vous la répartition de ces dons ?
Nous avons une grande salle que nous utilisons habituellement pour les soirées culturelles et autres événements, qui sert maintenant à stocker des denrées alimentaires. Nous avons commencé à en distribuer à des étudiants de la Maison de Tunisie, ensuite aux étudiants de la Cité universitaire, et même des étudiants tunisiens de toute l’Île-de-France.
Maintenant, les gens qui viennent, nous ne leur demandons même plus s'ils ont un statut d'étudiant. Nous faisons de 100 à 150 paquets par jour. Il y a des gens qui viennent, que je ne connais même pas, et qui déposent de la nourriture sans rien demander en retour. Pareil pour les dons d'argent. Un élan de solidarité auquel je ne m'attendais pas du tout.
Toujours pour aider les étudiants, vous avez lancé une nouvelle action…
Mercredi (22 avril), j'ai lancé une autre action pour des jobs pour les étudiants. Aider financièrement un étudiant c'est bien, mais lui offrir un job c'est encore mieux. C'est quelque chose nous avions déjà fait, avec quelques personnes qui m'avaient proposé des jobs pour les étudiants, à Carrefour, Franprix, des chauffeurs-livreurs, tout ça. J'en avais proposé à une vingtaine de personnes de manière ponctuelle.
Mais là, j'ai lancé une action sur tout le territoire français. Deux heures après le lancement, j'ai vu qu'il y avait déjà 35 offres. J'espère en avoir une centaine assez vite. Généralement ce sont des offres de jobs étudiants mais parfois il y a des offres de spécialistes, pour des informaticiens…
Pour ceux qui le souhaitent, vous aidez également au rapatriement. Quelle est votre organisation ?
Je recense toutes les demandes de rapatriement, avec le gouvernement tunisien. Il y a tout un questionnaire. Sur 13 000 étudiants tunisiens en France, il y en a 1 300 qui veulent être rapatriés. Ce n'est pas beaucoup mais il faut quand même leur offrir cette possibilité, parce qu'il faut se rendre compte que les étudiants ne reprendront pas leurs études avant septembre. Je pense que les premiers départs auront lieu à partir de la semaine prochaine (fin avril).
Est-ce que c'est un dispositif qui pourrait avoir vocation à rester en place à l'avenir, après le déconfinement, pour les étudiants tunisiens en difficulté ?
Quelque part, avec cette crise, nous avons gagné en expérience. Par exemple, nous avons souvent besoin de jobs étudiants, de stages, pour aider ceux qui sont en difficultés. Ce dispositif doit exister. C'est pour ça que j'ai même le projet de créer une association : les amis de la Maison de Tunisie. Qui ne seront pas forcément que des anciens résidents de la Maison de la Tunisie, des Alumnis… Avec le support de la Maison de Tunisie, nous avons le soutien de l'ambassade, du consulat et même de l'ambassade de France en Tunisie. C'est une action qui a plu à tout le monde. Et surtout qui sera intensifiée pendant ce mois de Ramadan.
Nous allons distribuer des plats chauds pour 200 personnes tous les jours. Un homme d'affaire va nous aider à avoir toutes les denrées alimentaires nécessaires. Nous allons également faire un appel. Tout ça va nécessiter une logistique lourde, mais nous avons des bénévoles, moi-même j'aiderai, mes enfants, tout le monde !