Rebaptiser les rues, faire vivre la mémoire de l’immigration

 Rebaptiser les rues, faire vivre la mémoire de l’immigration

Crédit photo : Association Contrevent.


Rebaptiser les noms des rues parisiennes pour mettre en avant les héros des luttes de l'immigration. La « balade décoloniale » aura lieu samedi 19 octobre.


Rebaptiser les rues


« L'idée c'est de débaptiser des rues. On va expliquer à chaque fois pourquoi. En l’occurrence pour des références coloniales. Ensuite on rebaptise avec les noms des héros des luttes de l'immigration », explique Ismaël El Hajri, militant du Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP). L'association initiatrice de la « Balade décoloniale » entend ainsi mettre en lumière les héros des luttes de l'immigration et replacer cette mémoire, souvent oubliée ou passée sous silence, dans le récit national.


Islamophobie


« Place de la lutte des sans-papiers », « rue du génocide des Tutsis » ou encore « Rue de la lutte contre l'islamophobie et pour l'égalité des droits ». Ce dernier nom de rue trouve un écho particulier avec ce qu'il s'est passé lors du Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté (11 octobre), lorsque l'élu du Rassemblement National, Julien Odoul, a pris à partie une femme voilée.


« Ce qu'il s'est passé à Dijon, c'est l'affirmation d'un sentiment de culture, d'histoire culturelle, supérieure à celle de cette femme qui s'est faite humilier avec son enfant », s'indigne le FUIQP. L'avocate de la femme voilée a d'ailleurs fait savoir qu'une plainte sera déposée au parquet de Dijon pour « violence en réunion par personnes dépositaires de l'autorité publique sur mineur et majeur à caractère racial ». Une autre pour « Incitation à la haine » sera déposée au parquet de Paris.


Histoire


Organisée le 19 octobre, la « Balade décoloniale » veut aussi commémorer : « Il est nécessaire d'être au courant de l'histoire des immigrations en France et des massacres qu'il y a eu. La Balade le 19 octobre, c'est aussi pour commémorer ce massacre des Algériens du 17 octobre 1961 », explique Ismaël El Hajri.


Commémorer mais aussi rendre hommage aux « héros du quotidien » avec la « Rue pour nos Chibanias et Chibanis. Honneur et dignité » rappelle le militant : « Les chibanis ce sont des travailleurs. Ils se tuaient le dos à travailler, avec un salaire minimum même en ayant parfois des postes à responsabilités. Il y a l'idée de conjuguer racisme et problème de classe ».


Invisibilisés


Les « nouveaux » de rues seront également l'occasion de parler de drames complètement passés sous silence comme les affaires Gaye Camara ou Ismaël Abdelkader. Ce dernier, mort dans des conditions floues et enterré dans le jardin d'un gendarme en 2006, a été retrouvé en 2012 à Pfetterhouse (Alsace).


En 2015, la chambre de l’instruction de Colmar confirmait le non-lieu dans l’enquête. Ses proches tentent toujours de faire rouvrir cette enquête. Les changements de nom des rues sont un moyen de remettre de la lumière sur tous ces cas : « Le but est de faire connaître et lorsque nous aurons institué un rapport de force véritable, nous pourrons ensuite nous faire entendre ».


« Il faut comprendre pour agir ensemble. Et surtout s'unir pour ne pas subir. Pour l'instant nous sommes désunis », pour le FUIQP qui ne compte pas lâcher ce combat.