Algérie : Un rapatriement bloqué par un consulat
Contrairement au Maroc et à la Tunisie qui n'autorisent pas le retour des dépouilles dans leurs pays d'origine, l'Algérie continue les rapatriements des défunts algériens morts en France. Toutefois, cela n'empêche pas des blocages administratifs au niveau des consulats.
Dans un article précédent, une famille franco-marocaine endeuillée évoquait le parcours du combattant pour l'enterrement de leur mère. Si le caractère binational des décès des franco-maghrébins n'est plus à démontrer, nous pouvons confirmer, malgré des informations contradictoires, que l'Algérie a décidé de maintenir les rapatriements de corps d'Algérien(ne)s vers leurs pays d'origine. Malgré tout, il arrive aussi que cela "coince" à cause de lourdeurs administratives.
C'est le cas d'une famille algérienne qui nous a contacté. Madame H. K. est décédée le 3 avril dernier à Montpellier des suites d'une leucémie et d'une insuffisance rénale qui l'a finalement emportée. Les certificats de décès que nous avons reçus font état de la mort de cette dame et du fait qu'elle est morte "de mort naturelle". "Elle a vécu toute sa vie en Algérie et venait pour des raisons sanitaires en France, comme il y a 3 ans à l'hôpital Gustave Roussy à Paris, nous indique un membre de la famille. Elle est rentrée à l'hôpital de Montpellier, une semaine environ avant son décès. Elle n'était pas dans les secteurs liés au Covid19."
La famille débute les démarches pour le transfert du corps et fait appel à des pompes funèbres spécialisées dans le rituel funéraire musulman et habituées au rapatriement. Elle se retrouve alors en butte à la décision du consul d'Algérie à Montpellier qui refuse de leur accorder l'autorisation de levée du corps. En effet, celui-ci suspecte que la mère soit décédée du COVID-19, sans la moindre preuve. Les certificats de décès prouvent pourtant le contraire. "Cela fait 17 jours que le corps est à la morgue, nous indique un membre de la famille. C'est contraire à nos valeurs et à notre religion. Son pays est l'Algérie.Tout est prêt pour son transport à l'exception de cette autorisation de levée de corps."
Le consulat d'Algérie à Montpellier demande la modification du certificat de décès et la précision sur la non-contagion, ce qui est impossible de la part des autorités sanitaires.Devant ce refus, la famille s'oriente vers le ministre des affaires étrangères algérien par un courrier datant du 13 avril 2020. Il est ainsi précisé que "bien qu'aucune disposition médicale ne l'impose, et afin d'éviter toute manipulation, il a été décidé de recourir à un cercueil hermétique à double paroi avec hublot." La douleur est perceptible dans ce courrier de la famille de cette femme algérienne, institutrice pendant toute sa carrière à Sidi-Bel-Abbès. A l'exception d'un seul fils, médecin hospitalier en France, elle se retrouve ainsi dévastée par cette impossibilité d'enterrer leur proche dans sa terre natale. La prise en charge en Algérie est assurée car un "membre de la famille sera présent à l'aéroport pour emmener le corps d'Alger à Sidi-Bel-Abbès."
Il nous a été fait état d'un telex envoyé au consulat d'Algérie à Montpellier par le ministère pour permettre le retour de la défunte dans son pays. Pourtant à ce jour, la situation semble toujours bloquée. Contacté par nos soins, le consulat d'Algérie à Montpellier ne nous a pas encore répondu. Gageons pour cette famille que la situation puisse se débloquer au plus vite !
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