Sauvetage en Méditerranée : le tribunal de Trapani donne raison aux ONG
Après sept ans de combat, le tribunal de Trapani (Sicile) donne raison aux ONG effectuant des sauvetages de personnes migrantes en mer Méditerranée.
Non-lieu. Après cinq ans d’enquête, et deux ans d’audience préliminaire, le tribunal de Trapani a finalement classé l’affaire. Les ONG Jugend Rettet, Save the Children, Médecins sans frontières étaient accusées d’avoir facilité l’immigration clandestine en direction de l’Italie en 2016 et 2017, notamment en se coordonnant avec des trafiquants libyens.
Le bureau du procureur de Trapani avait ouvert une enquête en 2016 et mobilisé des moyens démesurés, dont des infiltrations des équipes de sauvetage ou encore des écoutes téléphoniques.
21 membres d’équipage risquaient jusqu’à 20 ans de prison. Invoquant le caractère infondé des accusations, le juge a donc prononcé un non-lieu concernant 10 d’entre eux.
Caducs
« La décision du tribunal de Trapani, la meilleure que l’on pouvait espérer, est un signal politique majeur, car l’affaire a toujours été utilisée par ceux qui prétendent avec des arguments désormais caducs que les ONG participent au trafic d’êtres humains », se félicite Francesca Cancellaro, avocate des membres de l’équipage de Iuventa, navire affrété par l’ONG allemande Jugend Rettet.
Des arguments qui ont notamment permis d’entraver l’action des ONG. Au cours des douze derniers mois, l’Agence des droits fondamentaux de l’UE relevait qu’à 21 occasions, les autorités italiennes avaient immobilisé des navires de sauvetage. Soit un total de 460 jours loin des zones de sauvetage, sans pouvoir venir en aide aux éventuels naufragés.
Semer le doute
« Il est désormais clair que pendant des années, ces accusations fallacieuses n’avaient qu’un seul but pour ceux qui les ont proférées : semer le doute et ternir le travail des équipes humanitaires de secours en mer, entraver leurs efforts pour sauver des vies et éloigner des témoins gênants », accuse Christos Christou, président international de MSF.
Un travail largement entravé par le décret « Piantedosi ». Portant le nom du ministre de l’Intérieur italien, Matteo Piantedosi, ce décret, adopté le 2 janvier 2023, oblige les navires de sauvetage des ONG à se rendre « sans délai » au port de débarquement assigné par les autorités italiennes, juste après un premier sauvetage.
Très régulièrement, il est imposé aux navires humanitaires de débarquer les survivants dans des ports du nord de l’Italie, les éloignant ainsi de la zone de recherche et de sauvetage.