La liberté religieuse en régression dans le monde arabe, mais épargnée au Maroc et en Tunisie

 La liberté religieuse en régression dans le monde arabe, mais épargnée au Maroc et en Tunisie

La liberté religieuse dans le monde depuis 2014. Infographie AFP

Des « persécutions » ou « discriminations » importantes dans 38 pays, notamment sous l’action d’un « hyper-extrémisme islamiste » comme au Moyen-Orient où les attaques ont été « les plus massives » : la liberté religieuse a globalement subi une nouvelle dégradation entre 2014 et 2016, selon un rapport d’une organisation catholique publié mardi.


Aide à l'Église en détresse (AED), fondation internationale basée au Vatican, a examiné la situation de 196 pays de juin 2014 à juin 2016, estime que des persécutions religieuses sont établies dans 24 d'entre eux, de l'Indonésie à la Libye en passant par l'Inde. Dans 14 autres, comme l'Iran et l'Ukraine, des discriminations lui semblent constituées.


Selon le rapport, cette « dégradation » globale s’explique par un phénomène de violence que l'AED qualifie d'« hyper-extrémisme islamiste », marqué par un « processus de radicalisation exacerbé » et une « augmentation considérable des attaques ». Ainsi, depuis juin 2014, « des attaques islamistes ont été perpétrées dans un pays sur cinq à travers le monde, dont 17 pays africains » a comptabilisé l’organisation vaticane.


Certes, l'AED ne parle pas cette fois de « grave déclin » de la liberté religieuse, comme elle l'avait fait dans son précédent rapport, à l'automne 2014. « La situation est restée stable » dans 21 des 38 pays suscitant l'inquiétude, et s'est même améliorée dans trois : le Bhoutan, l'Égypte et le Qatar, note la fondation. Mais le constat d'ensemble était « déjà si mauvais » dans sept pays (Afghanistan, Irak, Nigeria, Corée du Nord, Arabie saoudite, Somalie et Syrie) qu'il « pouvait difficilement empirer ».


 


Maroc et la Tunisie, pays les plus tolérants du monde arabe


Néanmoins, 14 pays « ont vu leur situation s'aggraver nettement depuis 2014 » estime l'AED. C'est le cas de l'Algérie, où il est fait état de « condamnations et arrestations dans de nombreuses villes pour ceux qui n'observent pas le ramadan ». Le Maroc et la Tunisie font en revanche office de bons élèves en Afrique du Nord et dans le monde arabe.


Même si le Moyen-Orient n'est pas le seul concerné, « c'est bien dans cette région du monde que ces attaques ont été les plus massives », relève Marc Fromager, directeur de l'AED pour la France. « Les ciblages des chrétiens, des yézidis, des mandéens (minorité baptiste d'Irak, NDLR) et d'autres minorités par l'organisation État islamique et d'autres groupes fondamentalistes sont en violation de la convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide », fait valoir la note de synthèse du rapport. Ces persécutions sont pointées comme l’une des causes de la hausse massive du nombre de déplacés dans le monde, qui a atteint le record de 65,3 millions (+5,8 millions par rapport à 2014)


À côté des organisations criminelles – comme l'EI ou Boko Haram –, les États sont également responsables d’une « nouvelle vague de répressions », notamment le Turkménistan et la Chine, où l'AED pointe la « démolition de croix dans 2.000 églises ». En Érythrée, « au moins 3.000 chrétiens sont emprisonnés à cause de leur foi », selon l'organisation.


Fondée en 1947 – du temps du bloc soviétique athée – et aujourd'hui active dans 150 pays, l'AED n'est pas le seul réseau d'experts actif sur le terrain de la liberté de religion. Ses constats rejoignent globalement ceux du think tank américain Pew Research Center, de l'ONG évangélique néerlandaise Portes ouvertes (Open Doors), voire de l'observatoire français interreligieux Pharos.


Rached Cherif


(Avec AFP)