« Randonnée PJJ » – Episode 2
Randonnée PJJ – Jour 2, le 12 juillet 2022. Crédit photo : Nadir Dendoune
Notre journaliste Nadir Dendoune accompagne du 11 au 17 juillet des jeunes hommes, suivis par la PJJ (Protection Judiciaire de la Jeunesse) en Haute-Savoie. Pour ces gamins qui ont tous fait l’objet de décisions judiciaires, il s’agissait de leur première expérience en montagne.
Episode 2
On récupéra ce mardi matin avec une immense joie, à Saint-Gervais, Sébastien, le guide avec qui une solide amitié s’est liée au fil des voyages. « Le sang Sébastien », comme diraient les jeunes de Marseille.
Une fois le bus garé, les sacs vérifiés, les gourdes remplies d’eau, le groupe se mit en marche dans la bonne humeur. Il fallut juste quelques minutes aux jeunes hommes suivis par la PJJ pour comprendre qu’ils avaient été « bernés » et qu’ils allaient en chier pendant toute la semaine.
Trop tard pour faire marche arrière : les Cinq allaient devoir continuer chaque jour et faire preuve de courage pour aller au bout de cette expérience en montagne autour du Massif du Mont Blanc.
Pourtant, cette première étape entre Le Buet (1350 m) et le refuge de La Pierre A Bérard (1924m) était de loin la plus facile de toutes. La plus courte aussi. 5 heures, pauses comprises sous des températures assez clémentes pour la saison. La canicule étant prévue à partir de mercredi. Une première mise en jambe censée mettre en confiance le groupe.
Fofana comprit le premier l’entourloupe. Tout en continuant à marcher, il reprocha à Zouaoui de lui avoir caché la difficulté de l’exercice. Puis il s’arrêta net, comme pris par une révélation : « Ah, je sais pourquoi on dort dans des refuges différents ! Même si l’un d’entre nous est malade, il n’aura pas d’autre choix que de marcher ». Zouaoui ne répondit pas.
Chacun de nous tenta de les rassurer au mieux en rappelant aux membres du groupe qu’avant eux, les années précédentes, on avait entendu les mêmes complaintes de la part des autres jeunes. La première journée est souvent la plus difficile et blabla, et blabla. Il y a toujours une période d’adaptation et blabla et blabla. La vérité, c’est qu’ils n’étaient pas au bout de leurs peines. On repartit doucement en silence. Une joie de courte durée.
Cette fois-ci, ce fut au tour de Riyad l’hyperactif de se plaindre : « J’ai mal au ventre, je sais pas ce que j’ai », répéta-t-il. Moussa lui lança un regard noir. Riyad se ressaisit : « Suis un vaillant, suis un DZ (NDLR : un Algérien). Je lâcherai rien ». Le pays d’origine pour se motiver pour les uns, leur département pour les autres. Fofana se donna de la force: « Nous dans le 9-5, on est pas des endormis ».
Pour regonfler le moral des troupes, Adama mis de la musique. « C’est interdit en montagne », coupa Sébastien. « On préfère écouter la cascade », osa Khadija. Puis Riyad tenta un raccourci hors du sentier. Il fut tout de suite repris par la patrouille Zouaoui.
Le déjeuner à l’ombre sous les arbres vint à point nommé, seulement une heure et demie après avoir débuté le périple. Le sandwich poulet, fromage, tomate, mayo-ketchup, avalé, tout le monde observa scrupuleusement la sieste.
En quittant la pause repas, Fofana fit une déclaration solennelle : « Si dans une heure, on arrive pas au refuge, je me suicide. J’écrirai une lettre et je mettrai vos trois noms pour vous dire que c’était de votre faute », promit-il. Fous rires à profusion. Khadija fut également en difficulté physique toute la journée mais ne montra aucun signe d’agacement…
Puis, le groupe découvrit pour la première fois le refuge au loin. Riyad, ému et sans doute soulagé confia : « Moi à Paris, en une journée, il m’arrive de fumer 10 splifs. Là, depuis ce matin, je n’ai même pas fumé une cigarette. Je suis trop concentré sur la montée ». Puis, le jeune homme remercia les encadrants de l’avoir emmené ici oubliant l’espace d’une minute que le plus dur était à venir.
>> A lire aussi :
