Ramadan. Tunisie : 30 ONG appellent à l’ouverture des cafés et restos pendant la journée

 Ramadan. Tunisie : 30 ONG appellent à l’ouverture des cafés et restos pendant la journée

Une trentaine d’organisations de la société civile tunisienne appellent à ce que les cafés et restaurants puissent ouvrir en cours de journée durant le mois du ramadan.

La question ressurgit chaque année avec plus de prégnance : si en cette deuxième année de concomitance du ramadan avec l’épidémie de Covid-19, les défenseurs du droit de ne pas jeûner n’ont pu organiser ni manifestation, ni sit-in, l’Association tunisienne de défense des libertés (ADLI), une coalition d’une quarantaine d’ONG, a pu rassembler 31 signatures d’associations sur la base d’un texte qui ne s’articule plus uniquement autour des libertés individuelles, mais aussi de l’urgence économique.

C’est ce que confie Anouar Zayani, pour qui l’actuelle crise économique sans précédent représente une opportunité en ce sens, 80% des établissements de restauration se déclarant actuellement en faillite ou en extrême difficulté.

« Le secteur emploie selon la Chambre nationale des cafés et restaurants quelques 250 mille employés, ce qui est considérable. Nous avons pensé que c’est l’occasion de sortir des sentiers battus associatifs habituels, et d’appréhender cette année la question de la liberté du jeûne sous l’angle économique dramatique que vit ce secteur. Les patrons nous ont suivi dans un premier temps, mais ne sont pas allés jusqu’au bout dans notre démarche en n’étant pas signataires en fin de compte », regrette-t-il.

 

« Des circulaires fantômes »

Zayani poursuit : « Nous avons enquêté à notre tour sur l’origine légale de l’interdiction aux cafés et restaurants d’ouvrir de jour, sans succès, étant donné le peu de visibilité dont on dispose. Si la célèbre circulaire Mzali de 1981 revient chaque fois dans le débat, l’ancien ministre de l’Intérieur Lotfi Brahem en avait réfuté l’existence. Reste des circulaires datant des années 70 ainsi qu’un décret de 2011, dont il est difficile d’obtenir une trace écrite ».

Pour le militant, la prochaine étape consiste en une tentative de rassembler ces textes dans le cadre d’un recours devant le Tribunal administratif, dans la mesure où ils sont contraires à la Constitution de 2014 censée garantir la liberté de conscience.

Rappelant que la fermeture durant le mois saint est une mesure anticonstitutionnelle et sans fondement légal, les signataires du communiqué soulignent qu’il y va aujourd’hui de la survie de ce secteur auquel on impose de subir l’impact combiné d’un couvre-feu à 19h en plein mois de ramadan, habituellement l’un des mois les plus lucratifs.

« Nous appelons à la nécessité de permettre aux cafés et restaurants d’ouvrir leurs portes pendant la journée durant le mois de ramadan, tout en respectant toutes les mesures préventives, afin que ces derniers puissent compenser, ne serait-ce que partiellement, les pertes financières qu’ils ont subies… D’autant plus que le ministère des Affaires religieuses a permis l’ouverture de mosquées et leur fréquentation pendant la journée, ce qui contredit l’objectif des mesures annoncées qui ne pénaliseront que les cafés et restaurants », peut-on y lire.

Les signataires appellent les professionnels du secteur de revendiquer l’ouverture de leurs établissements pendant la journée pour défendre leur gagne-pain et l’Etat à clarifier les textes légaux et réglementaires qui interdisent l’ouverture de cafés et restaurants pendant la journée durant le mois de ramadan, et de les annuler en raison de leur incompatibilité flagrante avec les dispositions de la Constitution.

Parmi les signataires figurent notamment la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, l’EuroMed, la Coalition tunisienne contre la peine de mort, ou encore l’Association tunisienne des femmes démocrates ATFD.

En attendant une issue légale compliquée dans une société où l’observance du ramadan semble en apparence en constante hausse, le collectif « Fater » poursuit son effort annuel d’entraide sur les réseaux sociaux, en partageant les adresses d’établissements ouverts en journée.