Abdeslam Ourzik, un élu pas ordinaire
Seul membre d’une famille de sept enfants à avoir émigré en France, dans les années 1980, Abdeslam Ourzik, adjoint municipal dans la Vienne, revendique sa double culture.
Né à Meknès en 1964, Abdeslam Ourzik décide d’émigrer vers la France après sa terminale, convaincu par sa prof de maths. “Elle m’a conseillé d’aller y faire mes études, mais dans une petite ville pour des raisons pratiques de logement, de coût. J’ai opté pour Limoges, d’où elle était originaire.” A 19 ans, le voilà donc à l’université pour suivre un Deug sciences de la nature et de la vie, option sciences de la terre. “Ce fut un bouleversement culturel pour moi. De la France, je ne connaissais que Paris et Saint-Etienne à travers le football, et je devais travailler pour financer mes études…” Après une maîtrise de géologie appliquée, il gagne Toulouse pour y préparer son doctorat et, durant sa thèse, devient maître de conférences, “ça m’a permis de respirer”.
“Amener notre culture en milieu rural”
A la fin de ses études, il intègre la direction de l’Agriculture en Poitou-Charentes. Consultant pour plusieurs pays sur le développement agricole, notamment pour le Maroc dès 1996, il s’installe avec sa femme à Chauvigny, une petite ville de 8 000 âmes, près de Poitiers. “Mon épouse a quitté son travail pour reprendre un restaurant marocain à quelques encablures de là.” En 2006, il tombe dans le grand bain de la politique lors d’une banale visite chez son médecin. “Il était aussi maire de la commune et m’a demandé d’intégrer sa liste afin de mettre mes compétences dans le domaine de l’environnement au service des citoyens. Une fois élu, il m’a confié la partie gestion des espaces verts et de l’environnement.”
Lors du premier mandat, Abdeslam ne travaille que quelques heures par semaine, sans mission réellement importante. Ce n’est que lors du second mandat qu’il accepte un poste d’adjoint à l’Environnement. “J’avais fait le choix de ne plus travailler dans certains pays, ce qui me libérait du temps pour la mairie.” Représentant de la ville au sein de la communauté d’agglomérations du Grand Poitiers (quarante villes), il est en charge des dossiers eau et assainissement, des déchets ménagers et de la gestion des rivières.
Populaire à Chauvigny, il n’en oublie pas pour autant son pays natal. “J’y suis pratiquement dix jours tous les deux mois, je suis un très bon client de la Royal Air Maroc !” En France, Abdeslam Ourzik fait également la promotion du royaume chérifien. Lors de l’année du Maroc, en 1999, il monte avec un ami un événement dans la région Poitou-Charentes (aujourd’hui Nouvelle-Aquitaine) : “La caravane de l’Atlas”. “Nous voulions amener notre culture en milieu rural. On arrivait le vendredi en fin de journée, on installait la tente, et le lendemain on projetait des films sur le Maroc, on organisait un repas traditionnel, on échangeait… Nous sommes ainsi allés dans une vingtaine de villages durant l’été.”
“Je suis fier, je n’ai aucun complexe identitaire”
En 2008, il monte “L’escale marocaine à Poitiers” : “On disposait de 1 200 m2. On y a reconstitué le Maroc. On entrait par Tanger et on ressortait par le Sahara. Cela a duré huit jours et nous avons eu 7 000 visiteurs”.
Un engagement des deux côtés de la Méditerranée qu’il revendique et assume complètement : “Je ne suis ni un immigré politique ni économique. J’ai des compétences que je mets au service de cette double culture dont je suis très fier, et je n’ai aucun complexe identitaire.”
MAGAZINE FEVRIER 2018