Macron : « l’antisionisme est une des formes modernes de l’antisémitisme »
Après avoir affirmé qu’il ne pensait « pas que pénaliser l'antisionisme soit une solution » mardi matin, le président français a finalement annoncé mercredi soir que la France allait mettre en œuvre une définition de l'antisémitisme élargie à l'antisionisme. Emmanuel Macron répond ainsi à une ancienne demande du Crif.
« L'antisionisme est une des formes modernes de l'antisémitisme », a estimé Emmanuel Macron mercredi soir, reprenant un argumentaire utilisé par les lobbys sionistes, mais dénoncé par les milieux anticolonialistes et propalestiniens. Invité au dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) à Paris, le Chef de l’Etat a donc donné d’importants gages à son auditoire, allant jusqu’à faire le dangereux amalgame entre antisionisme et antisémitisme.
« La France, qui l'a endossée en décembre avec ses partenaires européens, mettra en œuvre la définition de l'antisémitisme adoptée par l'Alliance internationale pour la mémoire de la Shoah », qui intègre l'antisionisme, a déclaré le Président. Une évolution qui ne nécessite pas de passer devant le parlement pour amender le Code pénal, a-t-il précisé. Il s'agit de recommandations, qui permettront de mieux former les agents publics, les policiers ou les enseignants à lutter contre l'antisémitisme, mais pas d'une modification des textes juridiques, a expliqué l'Élysée.
Tel Aviv a rapidement réagi à l’annonce. « Le président Macron a informé le Premier ministre qu'il allait adopter la définition de l'antisémitisme de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA), qui a fixé que l'antisionisme est une forme d'antisémitisme », a affirmé un communiqué du bureau de Benjamin Netanyahou. Celui-ci a exprimé son « estime » pour cette décision, selon le communiqué.
Peu avant l’annonce, le président du Crif, Francis Kalifat, en avait fait la demande. « À l'unisson des autres pays européens, la France a voté en faveur de cette définition lors de son adoption par l'IHRA en 2016 et encore tout récemment fin 2018 dans la résolution du Conseil européen sur la lutte contre l'antisémitisme ». Le président du Crif réclame depuis longtemps une législation pour lutter contre l’antisionisme.
Mardi matin, l’Union juive française pour la paix (UJFP) avait vivement réagi à une initiative parlementaire voulant criminaliser l’antisionisme au même titre que l’antisémitisme. « Nous sommes juifs et nous sommes antisionistes », ont-il rappelé dans un communiqué, qui précisait que l’antisionisme est un mouvement « antiraciste » et anti « apartheid ».
Les milieux militants craignent qu’inclure l’antisionisme dans la lutte contre l’antisémitisme soit un moyen de faire taire les critiques contre la politique colonialiste d’Israël et les crimes commis contre les Palestiniens dans les territoires occupés illégalement au regard du droit international.
Rached Cherif
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