Des avocats libanais réclament des poursuites à l’encontre de Carlos Ghosn pour un voyage en Israël
Trois jours après son arrivée au Liban en provenance du Japon, au terme d’une évasion rocambolesque, Interpol a émis ce jeudi un mandat d’arrêt international contre Carlos Ghosn.
Mais ce n’est pas tout : dans une note, trois avocats libanais ont demandé au parquet général d’entamer des poursuites contre l’ex-PDG de Renault-Nissan en raison d’un voyage en Israël, où les Libanais ont interdiction de se rendre.
Dans le cadre de ses fonctions et d’un partenariat pour le lancement d’une voiture électrique, Carlos Ghosn s’était en effet rendu en Israël en janvier 2008, où il avait été reçu par le président et le Premier ministre de l’époque, Ehud Olmert et Shimon Peres.
Or la loi libanaise est très stricte sur ce point et interdit tout contact avec Israël, un pays avec lequel le Liban est techniquement en guerre depuis 1948. L’article 285 du code pénal prévoit une peine d'un an au moins d'emprisonnement pour « tout Libanais qui serait rentré, directement ou indirectement, en territoire ennemi, sans l'accord du gouvernement libanais».
« Avoir des rapports avec Israël ce n’est pas une question d’opinion, la loi interdit toute normalisation », a indiqué jeudi 2 janvier à l’AFP Hassan Bazzi, un des trois avocats ayant présenté une requête auprès du parquet général.
Le « rapport » présenté au parquet reproche à M. Ghosn d’avoir commis « le crime d’entrer en pays ennemi et d’avoir violé la loi du boycott d’Israël », a rapporté l’agence de presse officielle libanaise ANI.
« Où était le parquet général et la sûreté générale lors des précédentes visites au Liban de M. Ghosn, après qu’il se fut rendu en Palestine occupée et qu’il y fut photographié », s’est insurgé M. Bazzi. « Les pauvres sont poursuivis au Liban, tandis que ceux qui ont gagné des millions en faisant des investissements avec l’ennemi sont traités en héros », a fustigé l’avocat.
Sur les réseaux sociaux, les utilisateurs ont partagé une ancienne photo prise à Jérusalem montrant M. Ghosn et le président israélien défunt Shimon Peres.
En 2017, le réalisateur franco-libanais Ziad Doueiri avait eu des démêlés avec la justice libanaise pour des scènes de son film « L’Attentat » tournées en Israël avec des acteurs israéliens.
Jugé devant un tribunal militaire, il avait finalement bénéficié d’un non-lieu. En juin 2016, le célèbre auteur franco-libanais Amin Maalouf, élu en 2011 à l’Académie française a été la cible de violentes critiques après avoir accordé une interview à la chaîne israélienne i24. Ses détracteurs ont été jusqu’à évoquer une «trahison» à la cause arabe.
Dans un autre registre, en janvier 2015, Miss Liban s’était attiré les foudres pour avoir posé en compagnie de Miss Israël lors du concours de beauté international Miss Univers, certains Libanais appelant à la déchéance de son titre.
Quant au patriarche maronite, Béchara el Raï, il avait également été pris à partie, notamment par le Hezbollah, lors de sa visite en Terre Sainte en mai 2014 dans le cadre d’une tournée pontificale dans la région.
Il s’agissait de la première visite d'un dignitaire religieux libanais depuis la création de l'État d'Israël en 1948. Malgré les tentatives de dissuasion du Hezbollah, le chef de l’Église maronite avait maintenu sa visite, qualifiée par certains journaux proches du parti chiite de «péché historique».