Plainte contre la ministre de la Justice et des magistrats pour « détention arbitraire »

 Plainte contre la ministre de la Justice et des magistrats pour « détention arbitraire »

Mohamed Abbou

Les avocats Mohamed Abbou, Samia Abbou et Ahmed Souab, ancien magistrat administratif, ont déposé une plainte au pénal mardi 28 mai 2024 contre les juges de la chambre d’accusation ainsi que la ministre de la Justice, Leila Jaffel, pour « détention arbitraire » des prisonniers politiques Ghazi Chaouachi, Ridha Belhaj et Jaouhar Ben Mbarek.

Les juristes en question accusent la ministre de la Justice d’avoir ordonné des instructions en ce sens mais aussi d’avoir créé « un climat de terreur » auprès des juges les incitant à prendre des décisions en violation de la loi en vigueur. « Or, un climat et des pressions n’ôtent en rien la responsabilité des juges en question », a affirmé le fondateur du parti d’opposition le Courant démocrate, Mohamed Abbou.

Si celui-ci reconnaît que « politiquement, en termes de faisabilité, la plainte a certes peu de chances d’aboutir », il explique toutefois : « nous nous devions d’effectuer cette démarche en temps de despotisme qui à ce que les intéressés rendent des comptes le jour venu ».

Pour Elyes Chaouachi, le fils de l’avocat et ex ministre en détention Ghazi Chaouachi, « ils ont été kidnappés il y a plus de 15 mois et ils sont aujourd’hui détenus de force depuis le 19 avril 2024 ».

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La liste des détenus concernés par l’expiration de leur détention préventive comprend pour rappel les hommes politiques Khayam Turki, Ridha Belhaj, Ghazi Chaouachi, Jaouhar Ben Mbarek, Issam Chebbi, Abdelhamid Jelassi et l’homme d’affaires Kamel Letaïef. Ils ont été emprisonnés à la suite de mandats de dépôt émis le 25 février 2023. La liste des accusés inclue par ailleurs dans cette affaire Lazhar Akremi et Chaïma Issa. Ces derniers avaient été arrêtés dans le cadre de la même affaire puis laissés en liberté à la date du 13 juillet 2023. Malgré l’expiration des délais de leurs détentions préventives respectives, aucun d’entre eux n’a encore été libéré à ce jour.

 

Que dit le droit universel en la matière ?

La détention arbitraire est dite arbitraire lorsqu’une autorité prive de liberté une personne sans base légale. En cela cette détention constitue un crime ou un délit et une atteinte aux droits de l’homme qui se produit lorsqu’un établissement pénitentiaire joue d’erreurs ou d’incompétence ou si une autorité fait usage de la détention arbitraire comme une arme politique.

En droit canadien par exemple, une détention arbitraire est celle qui contrevient à l’article 9 de la Charte canadienne des droits et libertés et qui n’est pas autrement justifiée par l’article 1 de la Charte canadienne des droits et libertés. Les arrêts R.C. Grant et R.C. Suberu sont notamment des arrêts de principe de la Cour suprême en matière de détention arbitraire. Dans le droit pénal français, elle est explicitement associée à une séquestration. On la trouve généralement dans certains États à caractère dictatorial.

La détention arbitraire est en outre interdite par l’article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L’article 9 de la Déclaration universelle des droits de l’homme déclare, « Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ni exilé. »

Selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, « Pour éviter d’être classé arbitraire, une détention doit être appropriée, prévisible, proportionnelle, nécessaire, et basée sur la justice. »