Persécution des Ouïghours : Le Congrès s’interroge sur le rôle de géants de la Silicone Valley

 Persécution des Ouïghours : Le Congrès s’interroge sur le rôle de géants de la Silicone Valley

Les deux géants américains des semi-conducteurs ont contribué à fabriquer un superordinateur traquant les minorités musulmanes de Chine.

Des parlementaires américains ont demandé à Intel et Nvidia des explications sur l’utilisation de leurs technologies dans le cadre de la répression de la minorité musulmane ouïgoure en Chine. La lettre des représentants du Congrès fait suite à des révélations du New York Times. Selon le prestigieux journal, des puces américaines ont servi à construire un superordinateur utilisé pour surveiller et persécuter des minorités.

 

Fin novembre, le New York Times (article en anglais) révélait que des puces électroniques des fabricants Intel et Nvidia faisaient fonctionner le superordinateur traquant les Ouïghours dans les zones où le gouvernement persécute des minorités. « La technologie américaine alimente un des volets les plus invasifs de la surveillance de l’État chinois » depuis 2016, écrivait le journal.

Des révélations qui embarrassent les entreprises américaines de la Tech. Elles posent des questions sur leurs responsabilités quant à l’utilisation de leurs produits. Les deux entreprises, principaux fabricants mondiaux de semi-conducteurs, nient avoir eu connaissance du « détournement » de leurs technologies.

Marc Rubio, président de la sous-commission des relations étrangères du Sénat, et Jim McGovern, président de la Commission exécutive du Congrès sur la Chine, ont néanmoins écrit aux deux directeurs généraux. Ils leur demandent, dans une lettre rendue publique, de s’expliquer sur la vente de puces à une entreprise chinoise.

Un superordinateur digne de Big Brother

Celle-ci a fabriqué le superordinateur « Urumqi Cloud Computing Center ». Installé dans la région autonome du Xinjiang, il sert à traquer les Ouighours et les autres minorités musulmanes. Il a notamment un rôle équivoque de « police prédictive ». Il permet notamment de faire de la reconnaissance faciale, vocale et visuelle ciblée contre la population ouïgoure et les musulmans de la région.

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L’entreprise en question fait d’ailleurs partie des entreprises que les États-Unis ont placées sur leur liste noire en 2019. Mais, les ventes de puces par les entreprises américaines avaient été conclues bien avant.

Pour le moment, seul Intel a officiellement réagi aux révélations. Le leader mondial des microprocesseurs a déclaré qu’il ne tolère pas l’usage de ses produits pour violer les droits humains. Ajoutant qu’il cesse ou restreint ses activités lorsqu’il réalise qu’ils sont utilisés ainsi.

Mais, les deux parlementaires veulent en savoir plus, notamment sur le montant du marché. Ils attendent également de connaître les mesures prises par les deux entreprises pour prévenir contre une utilisation de leurs produits à des fins violant les droits humains. Ils demandent enfin à Nvidia et Intel s’ils avaient conscience de vendre des produits à une entité jugée à « risque pour la sécurité nationale ».

La responsabilité des entreprises en question

Ce n’est pas la première fois que de grandes entreprises sont pointées du doigt pour leurs manquements à leurs responsabilités en matière de droits humains. En mars dernier, un rapport souligne qu’au moins 27 usines avaient recours à de la main-d’œuvre forcée ouïgoure. Or, ces unités de production fournissent 83 des plus grandes marques mondiales : d’Apple à BMW, en passant par Nike, Samsung ou encore Sony.

Selon des chiffres des Nations Unies, le pouvoir chinois a fait enfermer plus d’un million de personnes issues des minorités. Des camps de travail et d’endoctrinement que Pékin préfère présenter comme des centres de formation professionnelle et de déradicalisation. Les autorités affirment ainsi lutter contre le terrorisme islamiste dans l’est du pays.

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La Chine va même jusqu’à persécuter ceux qui ont fui le pays et dénoncent cette situation depuis l’étranger, y compris dans des pays à majorité musulmane. Une douzaine de pays membres de l’Organisation de la conférence islamique ont d’ailleurs signé une déclaration soutenant la politique chinoise contre sa minorité musulmane. La Tunisie et le Maroc, rares pays musulmans refusant de s’y associer, font ainsi figure d’exceptions.