Palestine. Pas de requiem pour les défunts

 Palestine. Pas de requiem pour les défunts

Stelle d’une tombe du cimetière Al-Ghossein de la ville de Gaza qui a été en grand partie détruit par l’armée israélienne. Photo : AFP

Chaque bouchée est avalée avec un sentiment de culpabilité profond, chaque pas effectué sous le soleil dans un silence profond est une douleur, chaque plaisir savouré est une souffrance dès que les images de ces enfants affamés, à bout de force, portés à bras le corps par des mères en pleurs, ces horreurs de corps déchiquetés par les bombes de « l’armée la plus morale du Monde », ces cris de souffrance de populations entières, entassées dans des espaces exigus pour mieux les massacrer.

Des débris de pierres tombales éparpillés dans le cimetière principal d’Al-Shaaf, dans le quartier d’al-Tuffah, à l’est de Gaza, le 11 janvier 2024, après qu’il a été détruit au bulldozer par les forces israéliennes. Photo de AFP

 

Israël se fout du monde, Netanyahou, de triste mémoire, ne veut pas entendre parler d’un cessez-le-feu. Bien au contraire, le bourreau de Tel Aviv veut terminer sa mission d’éradicateur : il ne suffit pas à Israël d’avoir massacré plus de 30 000 Palestiniens de sang-froid, d’avoir expulsé le reste de la population de leurs maisons, de tirer délibérément sur les enfants, les bébés et les femmes enceintes, il va falloir achever le sale boulot.

Et pourtant, l’État hébreu peut être fier de ses soldats, ils ont réussi à s’attaquer avec une bravoure inimaginable à des macchabées déjà bien « assassinés » par leur collègues la veille. Ils ont ainsi déterré les corps de personnes récemment tuées et l’histoire macabre du cimetière de Jabaliya n’est pas un cas isolé.

Des tombes détruites, des organes humains retirés des sépultures avec une violence inouïe et dispersés au vent : des dizaines de vidéos et de photos, prises par journalistes gazaouis, montrent, images à l’appui la destruction d’une dizaine de grands cimetières du territoire palestinien saccagés depuis le début des opérations au sol de l’armée israélienne.

Une photo prise le 5 janvier 2024 montre le cimetière Al-Ghossein de la ville de Gaza, endommagé par l’armée israélienne. Photo : AFP

 

Même la chaîne américaine CNN, qui s’est contentée depuis le 7 octobre à relayer le narratif fourni clé en mains par l’armée Israélienne a osé reconnaître le 20 janvier, images satellitaires à l’appui, que seize cimetières avaient été détruits, dont celui de Bani Souhaila.

Même topo du côté du Monde dont la cellule d’enquête vidéo sur la base de l’analyse des images satellites de l’enclave prises entre le 8 octobre 2023 et le 20 janvier, le quotidien français conclut que « sur les quarante-cinq cimetières dans la bande de Gaza, vingt-deux ont été endommagés ou totalement rasés depuis le 7 octobre 2023, soit la moitié. Ces destructions peuvent être liées aux passages de blindés comme à des frappes aériennes ou des tirs d’artillerie. A Jabaliya, le cimetière d’Al-Fallouja avait déjà été la cible de bulldozers israéliens en décembre ».

De nombreuses ONG internationales telles que l’ONG Euro-Med Human Rights Monitor avaient d’ailleurs accusé les soldats de Tsahal d’avoir « volé » des dépouilles d’activistes en vue d’échanges futurs contre des corps d’otages israéliens.

Pourquoi s’attaquer à des dépouilles de Palestiniens qui ont été déjà victimes d’exactions israéliennes avant de rendre l’âme ?

Palestine. Pas de requiem pour les défunts
Des linceuls contenant des restes humains reposent dans la boue d’un cimetière de fortune, dont certaines parties auraient été détruites au bulldozer par l’armée israélienne pour exhumer les corps, dans le quartier d’al-Tuffah, à l’est de la ville de Gaza, le 11 janvier 2024. (Photo : AFP)

 

L’explication est à chercher du côté des décisionnaires hébreux et de leurs commanditaires de la Maison Blanche. Les uns comme les autres savent très bien ce que signifie le respect dû aux dépouilles des défunts dans la religion musulmane et dans la culture des arabes.

Dans cette culture, le respect des dépouilles des morts exige d’abord qu’on leur donnât une sépulture décente et de garder une visibilité pérenne des emplacements dans les cimetières pour permettre aux familles et aux proches de venir se recueillir régulièrement sur leurs tombes. Ce qu’ils font chaque vendredi et la veille du ramadan.

En agissant sauvagement, l’armée Israélienne dont la haine des arabes n’a pas de limite, espère ainsi se venger durablement des Palestiniens, les massacrant une première fois et les exhumant une seconde fois pour les offrir en pâture aux animaux domestiques, aussi affamés, soit dit en passant, que les populations civiles de Gaza.

Toucher à la sacralité des défunts, à l’intégrité corporelle de proches enterrés à la hâte, c’est blesser profondément une population qui refuse toujours, jusqu’à présent de baisser la tête malgré les humiliations de toutes sortes et les punitions collectives.

Il est sûr que les présidents de campus et cette centaine de professeurs des douze universités ciblées et dévastées, massacrés par l’armée israélienne devraient connaître le même sort, mais après tout que peut-on attendre d’une coalition de plusieurs puissances occidentales avec, à leur tête les Etats-Unis, bombardant nuit et jour, affamant, massacrant femmes et enfants (le tout avec la bénédiction des médias occidentaux) une population civile, sous prétexte « d’éradiquer les deux pelés et trois tondus du Hamas » ?  A part ça, tout le reste relève de l’instrumentalisation politique.