L’armée israélienne fait fermer une chaine de télévision palestinienne
L'armée israélienne a mené une descente vendredi avant l'aube dans les locaux d'une télévision à Ramallah, fermé ses bureaux et arrêté son directeur. Israël accuse Falestine al-Yom (la Palestine aujourd'hui) d'être le porte-voix du mouvement radical islamiste Jihad islamique et d'inciter à la haine dans ses programmes.
Tour de vis sécuritaire israélien
Le raid mené à Ramallah, centre de décision politique et économique palestinien en Cisjordanie occupée, est la première manifestation d'un nouveau tour de vis annoncé cette semaine par le gouvernement de Benjamin Netanyahu contre les médias palestiniens qui contribueraient, selon lui, à exciter les passions. La descente de l'armée à Ramallah a également visé, la société de production Trans Media située dans le même immeuble, qui fournit ses services à de nombreuses chaînes locales et internationales, dont Falestine al-Yom.
Depuis le 1er octobre, une vague de violences en Israël et dans les Territoires palestiniens a coûté la vie à 188 Palestiniens, 28 Israéliens, deux Américains, un Érythréen et un Soudanais, selon un décompte de l'AFP. La plupart des Palestiniens morts sont des auteurs ou auteurs présumés d'attaques. Vendredi, une nouvelle attaque a eu lieu dans la vieille ville de Jérusalem, où un Palestinien a poignardé à la poitrine un ultraorthodoxe juif d'une trentaine d'années. L'assaillant âgé de 18 ans et originaire de Cisjordanie a été arrêté, a dit la police.
La diffusion continue
Des câbles étaient coupés et pendaient des murs dans les locaux de Trans Media ; les salles de montage et de diffusion avaient été vidées de leurs équipements. Sur la porte voisine du bureau de Falestine al-Yom, un ordre de l'armée israélienne proclamait en arabe : « ce lieu est fermé avec effet immédiat et doit rester fermé ».
Raghda Atmeh, correspondante de Falestine al-Yom, a catégoriquement rejeté les accusations israéliennes. « Tous les journalistes palestiniens qui rapportent la vérité sont vus (par Israël) comme incitant à la haine », a-t-elle dit. La diffusion des programmes, assurée depuis Beyrouth, continuait cependant. En parallèle, les forces israéliennes ont arrêté chez lui le directeur administratif du bureau de Falestine al-Yom, Farouq Aliat, le caméraman Mohammed Amr et l'ingénieur Chebib Chebib, selon le syndicat des journalistes palestiniens. Ces deux derniers ont ensuite été relâchés.
« Les dégâts sont énormes et nous ne pouvons pas encore les chiffrer », a dit le directeur de Trans Media Ibrahim Houssary alors que la société « ne peut être tenue pour responsable d'aucune ligne éditoriale ».
La Cisjordanie au bord de l’explosion
Falestine al-Yom « appelle au terrorisme contre Israël. Elle est un outil essentiel du Jihad islamique pour inciter à la violence », accuse le renseignement israélien. Quant à son directeur, toujours retenu, c'est « un militant du Jihad islamique déjà emprisonné en Israël pour ses activités ». Israël considère le Jihad islamique, deuxième force islamiste dans les Territoires palestiniens, comme « terroriste », de même que la majorité des mouvements palestiniens.
Falestine al-Yom utilise depuis début octobre un logo « Intifada de Jérusalem » quand elle évoque les violences actuelles. Ces violences résultent des vexations de l'occupation, de l'absence de perspective d'indépendance, des frustrations économiques et du discrédit des autorités palestiniennes, estiment les experts.
Israël a déjà fermé deux radios palestiniennes dans la poudrière de Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, en novembre. Devant la poursuite des violences et sous la pression de la droite la plus dure et de l'opinion, le gouvernement Netanyahu a décidé mardi de nouvelles mesures ressemblant à de la punition collective : répression accrue des médias, achèvement du mur de sécurité autour de Jérusalem, révocation des permis de travail pour les proches des auteurs d'attentat et destruction plus rapide des maisons d'auteurs d'attentat.
Rached Cherif