Palestine. Gaza a vaincu
Les cris de joie, les explosions de liesse et le bonheur des Palestiniens sont bien réels, visibles et palpables. Alors que la trêve entre le Hamas et Israël prenait vie sous forme de communiqués laconiques, des deux côtés du conflit, le contraste avec le début de la guerre sanglante est frappant. Il est aussi une mesure de l’exploit politique et stratégique d’une poignée de Palestiniens décidés à libérer Gaza ou mourir.
Le ciel est dégagé, la voie est libre, du moins du côté palestinien, et pour les familles des otages qui sont sur des charbons ardents parce qu’en ce qui concerne Netanyahou et ses sbires, l’heure est encore aux tergiversations : le Premier ministre israélien a attendu ce jeudi pour s’adonner à son exercice favori : le mensonge.
Son bureau, qui a annoncé que « le Hamas s’était retiré de l’accord de cessez-le-feu à Gaza », a été tout de suite démenti par le mouvement palestinien qui a, bien au contraire, souligné « son engagement à respecter l’accord annoncé mercredi par les médiateurs ».
Dans le rôle de maître chanteur, le chef de l’exécutif excelle, d’autant plus que la fin de la guerre signifie pour lui et sa clique le clap de fin de sa carrière politique et certainement un passage par la case prison.
Toujours est-il que le Hamas et Israël ont bien conclu un accord pour mettre fin à la guerre à Gaza et libérer les otages, ravivant des espoirs de paix dans la région.
On peut reprocher ce qu’on veut à Jean-Luc Mélenchon mais le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il reste le seul homme politique occidental qui s’est félicité de la fin de la guerre. Le leader des Insoumis est toujours égal à lui-même quand il salue l’annonce d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, ne se privant pas de rappeler ses positions dès le départ sur X « que le futur n’oublie pas la culpabilité et la honte qui est celle de nos gouvernants qui ont laissé faire, regardé ailleurs et encouragé le massacre ».
« Puisse le cessez-le-feu tenir et la vie des survivants être épargnée désormais. Que les otages et les prisonniers retournent à la vie et que s’adoucissent les cicatrices de leurs plaies physiques et morales. Puissent les vivants pleurer leurs morts sans crainte et nos larmes effacer la haine qu’ils ressentent légitimement », a écrit le candidat à la présidentielle sur X.
Cette bouffée d’oxygène ne devrait pas nous faire oublier qu’un État qui n’a pas de scrupule à brûler vivants des bébés dans des tentes en plastique, qui a fait du massacre des innocents un modus operandi, n’est pas digne de confiance et, comme par le passé, Israël ne respectera aucun accord. Une fois les otages revenus, il faudra s’attendre au pire.
Mais cela dit, le génie de la Liberté, qui a cassé la violence et la volonté de l’armée « la plus invincible du monde », soutenue par la « première puissance du monde », épaulée par tous les gouvernements du monde occidental et avec la complicité des chefs d’État arabes, a en même temps fissuré durablement le mur de Berlin des certitudes israéliennes avant de casser celui des idéologies européennes.
La cause palestinienne a renversé la Bastille d’un Occident désormais divisé entre les citoyens de plus en plus nombreux qui n’ont plus la même vision du conflit proche-oriental et les personnes qui continuent à voir Israël avec les œillères de médias vendus aux oligarchies.
Quant à la classe des dirigeants, politiquement inhibée, elle observe, terrorisée, le centre de gravité qui glisse vers le monde arabe, vers le sud, de Paris vers Rabat, de l’Allemagne vers les pays où fleurissent les orangers.
Toujours est-il que la victoire de Gaza empêchera les Occidentaux de dormir, eux qui misaient sur Tsahal pour raser définitivement la résistance palestinienne avant de s’occuper des Arabes du coin.
Cette hystérie islamophobe, que les Palestiniens ont chèrement payée (résistance à Gaza = bénéfice au Hamas), dont nous avaient abreuvé les journaux télévisés qui ont façonné l’opinion française terrorisée à l’idée de la naissance d’un autre impérialisme que celui de l’oncle Sam.
Cette opinion publique est aujourd’hui contrainte à une autre lecture de l’ébranlement d’Israël, ce bras armé de l’Occident en plein Proche-Orient arabe, obligée de reconsidérer ce que l’avenir réserve à cette région.
L’avenir n’appartient certes pas au passé, mais réduire ce qui se passe aujourd’hui à Gaza à de modestes arrangements conjoncturels, c’est croire que l’Histoire puisse repasser ses plats alors que l’armature du système des revendications nationalistes de l’extrême-droite de l’État hébreu se disloque petit à petit, face aux coups de boutoir des réalités démographiques, confessionnelles et politiques du Moyen-Orient.