Omar Bendjelloun : « Israël regroupe les qualifications criminelles »

 Omar Bendjelloun : « Israël regroupe les qualifications criminelles »

Archives personnelles d’Omar Mahmoud Bendjelloun

Avocat aux barreaux de Marseille et Rabat, membre exécutif de l’association des Barreaux du Maroc et spécialiste des droits de l’homme, Omar Mahmoud Bendjelloun revient pour nous sur la saisie de la Cour Pénale Internationale (CPI) par 5 pays sur la situation à Gaza.

Le Courrier de l’Atlas : L’Afrique du Sud, Bolivie, Comores, Bangladesh et Djibouti ont saisi la Cour Pénale Internationale (CPI) pour enquêter sur la situation à Gaza. La CPI doit-elle être saisie par des pays ou par des associations de victimes ?

Omar Mahmoud Bendjelloun : Selon le traité de Rome, seuls les 124 États ayant ratifié la convention et le Procureur peuvent saisir ou s’auto saisir pour poursuivre une entité quant aux crimes contre l’humanité prévus dans la dite convention. Ceci dit, le Procureur a la qualité de poursuivre sur la base d’une information des victimes ou d’associations de victimes. Israël a déjà été sujette à plusieurs informations dans ce sens, vu que ses crimes sont permanents avant même la création de la CPI.

LCDA : La CPI peut-elle juger autant des pays que des organisations criminelles ?

Omar Mahmoud Bendjelloun : La CPI poursuit des personnes, et non des États ou des organisations criminelles. Nous sommes dans le même état d’esprit que le procès de Nuremberg, du tribunal pour l’ex-Yougoslavie ou de celui sur le Darfour.

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LCDA : Quelles sont les qualifications criminelles pour lesquelles la CPI est compétente ?

Omar Mahmoud Bendjelloun : Il y en a 4 : le crime contre l’humanité, le génocide, le crime de guerre et l’agression dans le sens militaire. De ces 4 qualifications majeures, jaillissent d’autres qualifications comme celle de la ségrégation raciale ou l’apartheid. Aujourd’hui, Israël regroupe toutes ces qualifications dans chacune de ses actions militaires ou politiques. Tout ceci de manière continue en plus !

Quelles sont les difficultés majeures que peuvent rencontrer les procureurs de la CPI ?

Omar Mahmoud Bendjelloun : La CPI est constituée de nations qui ont ratifié la convention. Ainsi, la Cour peut fonctionner en toute efficacité et légitimité. Dans le cas de la non-ratification d’un État, celui-ci n’est donc pas concerné ou peut même prévoir des poursuites contre ceux qui le poursuivrait devant la Cour. Les Etats-Unis l’ont ainsi prévu car ils sont très hostiles à la CPI. Aussi, la question de la collaboration des États membres est cruciale. Cela concerne les enquêtes de terrain, les perquisitions ou les extraditions.

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Ces démarches ont-elles des chances d’aboutir quand on sait que plusieurs pays n’ont pas ratifié le Statut de Rome ?

Omar Mahmoud Bendjelloun : Si une grande majorité a ratifié le traité de Rome, l’efficience de la justice pénale internationale dépend de la coopération des États et de facto du rapport de force et des contingences politiques nationales, régionales et multilatérales. La CPI est un système judiciaire fragile. Toutefois, elle a le mérite d’exister pour honorer le principe de justice internationale. Elle s’inscrit dans une dynamique constructive de la gouvernance mondiale.

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