Jabir Ibn Hayyan, le père de la Chimie
Connu en Occident sous le nom latin de Geber, ce savant arabe du VIIIe siècle est considéré comme l’un des fondateurs de la chimie moderne.
On lui doit nombre d’équipements de laboratoire, la découverte de substances chimiques, ainsi que divers procédés comme la distillation et la cristallisation.
Eminent savant et érudit, Abou Moussa Jabir Ibn Hayyan a excellé dans des domaines aussi variés que l’alchimie, la médecine, la métaphysique, l’astronomie, la biologie et les mathématiques. Il serait né en 721 à Tus, province de Khorasan, en Perse, alors sous le règne du califat de Bagdad. La profession de son père, pharmacien, aurait suscité l’intérêt de Jabir pour l’alchimie. Après la prise du pouvoir par les Abbassides, il est envoyé à Koufa (l’actuel Irak) pour ses études et devient le disciple du maître Ja’far al-Sadiq, une haute autorité dans les sciences ésotériques. Adulte, il exerce en tant que médecin, sous la protection d’un vizir issu de la puissante famille des Barmakis, pendant le califat de Haroun al-Rachid.
Il devient alchimiste à la cour du calife. Bien que maître en la matière, il veut transformer l’alchimie – du mot arabe “al-kimiya” –, teintée d’occultisme, en une discipline scientifique fondée sur l’expérimentation et les travaux appliqués en laboratoire. Pour réaliser ces derniers, Jabir crée nombre d’ustensiles, tels que l’alambic – de l’arabe “al-imbiq” –, instrument de base pour tout chimiste, et qui permet d’effectuer des distillations de manière scientifique et efficace.
Ses traités sont devenus des textes de référence
De ses nombreuses contributions à la chimie, on peut citer la découverte des acides chlorhydrique, nitrique, citrique et tartrique, de nouveaux procédés de raffinage des minéraux, l’amélioration de production de l’acier et du verre, la prévention de la corrosion, le vernissage de tissus imperméables, de nouvelles méthodes de teinture ou de dorure. Il invente aussi “l’eau régale”, un réactif chimique permettant de dissoudre l’or.
Jabir Ibn Hayyan est le premier à avoir systématisé les procédés fondamentaux de la chimie moderne : la cristallisation, la distillation, la calcination, la sublimation et l’évaporation. Sa classification des éléments en métaux, non-métaux et substances volatiles est toujours actuelle. Il introduit certains termes arabes, comme “al-kali” (alcalin) ou “al-iksir” (élixir), lesquels entreront dans le vocabulaire scientifique universel. Deux de ses plus importants traités – Kitab al-kimya (Le Livre de la chimie) et Kitab al-sab’een (Le Livre des 70) deviennent des textes de référence et seront traduits en latin au Moyen Age.
On sait peu de choses sur la vie privée de ce savant. En 803, la chute de la puissante famille des Barmakis entraîne sa disgrâce. Il est assigné à résidence à Koufa jusqu’à sa mort, en 815 (à l’âge de 94 ans !). Pour la postérité, il demeure à jamais celui qui a fait la jonction entre l’alchimie ancienne et la chimie moderne.