Note de lecture – Une Maria Messina ne fait pas le printemps
J’avouerais bien que la fin de la lecture de ce roman « Une fleur qui ne fleurit pas », au plaisir réel de lire une fresque de l’Italie des années 20 s’est ajoutée la stupeur de se retrouver devant une société dont les codes paraissent copiés sur ceux de mon pays le Maroc. La même trame des rapports sociaux qui régissaient les relations hommes/femmes de l’époque que l’on retrouve toujours de ce côté-ci de la Méditerranée.
L’omniprésence de la famille dans la conclusion (ou non) des mariages, le même souci des convenances, des femmes soumises au diktat de la virginité et une société marquée par un honneur qui se situe toujours en dessous du nombril.
Dans ce pays où « les femmes, avec leur tricot ou la quenouille, se réunissaient autour du feu après s’être occupées des bêtes dans l’étable et avoir accompli divers travaux », il n’était pas de bon ton pour une femme de se laisser envahir par un désir d’indépendance en portant cheveux courts et « se laisser bercer par une vie mondaine, faite de flirts et de sortie entre amies ».
Ce roman écrit en 1923, réédité par les éditions Cambourakis, met en scène une jeune femme qui tente de donner du sens à son existence, face à de rudes conditions de vie qu’imposait à l’époque la société au sexe féminin.
C’est l’Italie, du début du XXème siècle, et elle, c’est Franca, fille relativement libérée de la société aristocratique, facilement rebelle aux convenances attendues, qui se retrouve emportée par une passion qui lui impose de se soumettre progressivement aux diktats sociaux pour tenter de faire fléchir un homme très conventionnel avec l’espoir du mariage.
Ce roman composé en 1923 par l’écrivaine sicilienne Maria Messina est non seulement intéressant par la fluidité du style et la simplicité des expressions choisies mais de plus, l’excellente traduction au français de Marguerite Pozzoli ne fait rien perdre de la saveur de la fiction.
L’auteure réglait-elle ses comptes avec une société sclérosée qu’elle côtoyait à Naples où elle a passé l’essentiel de sa vie ? ou bien s’agit-il tout simplement de la continuité d’une œuvre prolifique composée de recueils de nouvelles et de romans, avant d’être emportée par la sclérose en plaques, en pleins bombardements des alliés de la Seconde Guerre mondiale ?
En tout cas, on saura gré à Pozzoli d’avoir rédigé une postface au roman qui en dit long sur « des demoiselles qui vivent en province dans les années 20 : attirées par la modernité, aspirant à une certaine émancipation, elles sont jugées avec sévérité dès qu’elles enfreignent des règles ancestrales. Loin d’être un roman à l’eau de rose, comme le titre pourrait le laisser soupçonner, Un fiore che non fiori est bel et bien l’histoire d’une libération entrevue mais impossible ».
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