Tunisie. Yadh Ben Achour remet les pendules à l’heure

 Tunisie. Yadh Ben Achour remet les pendules à l’heure

Sur Nessma TV


 


Le climat social reste tendu en Tunisie. Ce week-end, la centrale syndicale UGTT a encore rassemblé ses troupes, en province cette fois, à Sousse et à Nabeul, pour des marches géantes aux airs de démonstration de force. Sans compter le retour des violences dans les universités, entre étudiants d’extrême droite et ceux de l’UGET. C’est dans ce contexte houleux que Yadh Ben Achour est intervenu sur Nessma TV.




 


Auparavant, ce qui devient désormais la tradition des vendredis de soutien au gouvernement, s’est encore illustré par trois manifestations islamistes simultanées dans la capitale, dont l’une appelait toujours au « nettoyage des médias ».


Une journée à l’issue de laquelle on pouvait lire sur les réseaux sociaux : « Les salafistes ont bien travaillé aujourd’hui ». Sans compter le retour des violences dans les universités, entre étudiants d’extrême droite et ceux de l’UGET.


Pour se défendre lui-même contre les accusations d’escalade, le gouvernement semble opter pour une certaine fuite en avant. Lotfi Zitoun, bras droit et conseiller politique de Hamadi Jebali, a accusé lors d’un débat télévisé, tout en insinuations, l’UGET et l’opposition de fomenter un complot pour faire chuter son gouvernement dans le courant du mois de mars.


Dans ces conditions, la parole d’un Yadh Ben Achour, habituellement celle du sage, avait valeur d’arbitrage hier dimanche en invité d’honneur de Nessma TV.


 


Un rappel à l’ordre de l’opposition


Ceux qui voient en le constitutionnaliste un opposant systématique de l’actuel gouvernement de transition ont sans doute été surpris.


Hier soir, il a mis en garde contre une banalisation de slogans appelant à la chute du gouvernement. Il en a appelé au sens de la responsabilité des manifestants, tout en reconnaissant le caractère spontané de leur démarche.


« Ce gouvernement n’a pas encore eu le temps de se familiariser avec les rouages de l’Etat, ni même de prendre ses marques, que l’on cherche déjà à le déstabiliser », a-t-il déploré.   


« Sur ce point précis, je soutiens le gouvernement », a-t-il insisté, confirmant sa loyauté à la réussite de la transition démocratique, en chef, toujours virtuellement en poste, de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution.


 


Un ton autoritaire     


La sortie médiatique très attendue était aussi l’occasion pour le juriste de prendre position en des mots très durs contre le ciblage des médias. Il a qualifié les attaques dont font objet les journalistes de « procédés Benalistes », tout en martelant que si réforme des médias il devait y avoir, celle-ci devra venir de l’intérieur-même du corps de métier.


Plus encore dans son élément pour trancher sur l’épineuse question de la mention de la charia dans la Constitution en cours de rédaction, il a ouvertement accusé ceux qui cherchent à inclure la loi islamique comme source essentielle du droit de volonté de « semer la discorde au sein de la société tunisienne ».


Deux arguments forts ont été émis par Ben Achour contre une constitutionnalisation de la charia :


–          Nous ne sommes pas d’accord sur ce que nous entendons par charia. Ceux hostiles à l’interprétation et l’exégèse et attachés au mot dans ce qu’il a de plus littéral, sont dépassés par les évènements et l’Histoire.


–          La révolution l’a consacré : La Tunisie est une démocratie et un Etat de droit où est appliquée une loi objective émanant du peuple et de ses élus. Il ne saurait y avoir de loi supérieure à la volonté du peuple, au risque de se voir imposer, d’avance, une loi suprême pré-écrite.


Avec une dose d’audace, Yadh Ben Achour a par ailleurs affirmé que son Instance était probablement plus légitime que l’Assemblée constituante, en termes de représentativité des diverses composantes du peuple et d’incarnation des objectifs de la révolution.


Une façon de souligner qu’elle était une émanation révolutionnaire directe, là où la campagne électorale, plusieurs mois après le 14 janvier 2011, a pu permettre à la réaction politique de s’organiser.


Ben Achour sort globalement grandi d’une intervention qui lui a permis de réaffirmer son autorité morale de figure politique et historique incontournable de la Tunisie moderne.


Seif Soudani