Tunisie. 1 Tunisien sur 2 ne se reconnaît dans aucun parti politique
L’institut d’études et de sondages Sigma Conseil vient de rendre public un sondage d’opinion intitulé « Le Tunisien et la situation générale du pays ». Un millier de Tunisiens y ont été interrogés aux quatre coins du pays à propos de la situation économique, sécuritaire et politique du pays. Daté du 2 mars 2012, il apporte de nombreux enseignements sur la nouvelle donne post élections.
Globalement, les statistiques révèlent des Tunisiens pessimistes sur le climat général du pays : deux tiers (65%) estiment qu’il est mauvais. 53% en pensent de même pour la situation sécuritaire (un léger mieux en comparaison avec la dernière étude).
Mais pas moins de 82% ne sont pas satisfaits de la situation économique. Or, paradoxalement, 55% sont satisfaits de l’action du gouvernement actuel. Une donnée assez irrationnelle, souligne Hassan Zargouni, PDG de Sigma.
Il souligne cette contradiction selon laquelle là où le gouvernement est traditionnellement attendu au tournant : en matière d’emploi et de croissance, les Tunisiens en sont mécontents, mais qu’ils restent malgré tout majoritairement confiants vis-à-vis du même gouvernement.
Le gouvernement Jebali bénéficie donc encore probablement de cet état de grâce dit des 100 premiers jours.
Un certain esprit critique, une tradition de la contestation, « restent étrangers à la société tunisienne dans son ensemble », commente toujours Zargouni.
Orphelins d’un parti qui leur ressemble
Une autre raison manifeste au maintien de la confiance dans le gouvernement est le fait qu’une majorité de Tunisiens affirment n’avoir pas encore regretté leur vote. Cependant, est-ce par désintérêt du politique, 48,8% des Tunisiens déclarent ne se reconnaître aujourd’hui dans aucun parti.
Viennent ensuite 28% des Tunisiens qui estiment que le parti Ennahdha est proche de leurs idées. 3ème, le CPR n’est qu’à 9% d’empathie populaire.
La faute à des partis politiques qui n’ont pas encore su faire rêver les Tunisiens, en l’absence d’une figure marquante de leader dans l’opposition, souligne l’étude. Seuls 20% des sondés sont satisfaits du rendement de l’opposition.
Trois grandes tendances se dégagent à l’issue du sondage : un tiers des Tunisiens voient d’un bon œil le projet de société islamiste, un tiers est pragmatique, plutôt apolitique et soutenant le pouvoir en place quel qu’il soit, et un dernier tiers ouvertement moderniste et « très inquiet de l’islamisation du pays », notamment des visites de prédicateurs radicaux.
Or, la donnée clé est ici le « tiers du milieu », celui qui d’une certaine façon vote au gré du vent et des sentiments, le plus potentiellement influençable.
C’est précisément ce tiers d’indécis marchant à l’affect qui peut garantir, demain, la pérennité du pouvoir aux vainqueurs des prochaines élections, surtout si la Constituante opte pour un système parlementaire. Un système dont l’Histoire montre qu’il est très difficilement réversible, peu enclin à l’alternance.
Seif Soudani