Tunisie. Open Government et campagne « 7ell » : Karima Souid livre son point de vue
Les téléspectateurs des débats de l’Assemblée nationale constituante ont pu noter, sans toujours comprendre de quoi il s’agissait, que de nombreux élus, plutôt à gauche de l’hémicycle, brandissaient dernièrement des pancartes noires avec l’inscription « 7ell » (littéralement « ouvrez ! » en arabe dialectal tunisien).
Il s’agit d’une vaste campagne, relayée notamment par les réseaux sociaux, dont l’une des revendications essentielles est de « favoriser l’inscription dans la constitution de la transparence totale comme règle de gouvernance ainsi que les lois relatives telle que le droit de l’accès à l’information » et de « favoriser les réformes OpenData et OpenGov dans l’administration tunisienne ».
Karima Souid est l’une de ces élus soutenant activement cette démarche. Elle explique que l’objectif, c’est d’abord de « gouverner en informant ». C’est aussi pour l’élue Ettakatol la promotion de la démocratie participative.
Elle relativise cependant : « l’Open gov. n’a pas pour vocation de mettre l’ensemble des données à la disposition du grand public », répondant à la critique de la transparence érigée en valeur absolue et pouvant ainsi mettre en péril la sécurité nationale ou l’intégrité des données relatives à la vie privée.
En réalité, tous les partis semblent plutôt favorables à cette doctrine, y compris Ennahdha qui, dans son programme, fait mention de son intention de promouvoir l’open data dans la gouvernance.
Un concept encore expérimental
Difficile dans les faits de se faire une idée sur le caractère populiste ou non d’une telle demande. La page Wikipedia traitant de l’Open government contient d’ailleurs un avertissement quant à la neutralité de l’article, tendant à prouver que c’est un concept toujours sujet à controverse.
Aux Etats-Unis où l’ « open government initiative » a été expérimenté à grande échelle, sous l’administration d’Obama, a eu un succès mitigé. La Maison Blanche s’emploie bien à en faire autre chose qu’un vœu pieux, mais le projet est souvent perçu comme redondant avec le « Freedom of Information Act », une loi datant de 1966.
Toujours est-il que le culte de la transparence à n’importe quel prix présente déjà quelques dérives. Hier lundi, le mouvement Anonymous, devenu une franchise difficile à authentifier, publiait une vidéo dans laquelle il menace de s’en prendre aux sites gouvernementaux tunisiens.
Né de la volonté de combattre notamment la censure et prôner la transparence tous azimuts, le mouvement préconise un anonymat problématique en ce qu’il exige la transparence pour autrui, mais garde l’anonymat dès lors qu’il s’agit de ses acteurs justiciers masqués des temps modernes.
Seif Soudani