Tunisie. Marzouki se cherche une stature internationale

 Tunisie. Marzouki se cherche une stature internationale

Fort de l’aura révolutionnaire du pays qu’il représente


Faute de réelles prérogatives sur le plan national, le président Marzouki semble tout miser désormais sur l’international, à en croire les ambitieuses intentions affichées de son déplacement à Bagdad. Une audace qui a fini par payer. (Photo AFP)




 


Adnen Manser, porte-parole de la présidence de la République, convoquait vendredi une conférence de presse pour l’annoncer fièrement : la totalité des 22 Tunisiens détenus en Irak seront finalement libérés. Dans le courant de la semaine pour 13 d’entre eux, non impliqués dans des activités terroristes, dans le courant du mois d’avril pour les 9 autres, des djihadistes qui devront purger le reste de leur peine au pays.


Marzouki obtient donc gain de cause. Un succès diplomatique au terme d’un harcèlement intensif des autorités irakiennes en marge du sommet de la Ligue Arabe, et en l’absence remarquée du ministre des Affaires étrangères de la délégation tunisienne.


Fort de l’aura révolutionnaire du pays qu’il représente à une Ligue Arabe empêtrée dans la crise syrienne, il annonça la couleur d’emblée lors de son allocution : « La Ligue doit revoir en profondeur ses structures », lança-t-il sur un ton autoritaire, avant de formuler des excuses à l’Irak au nom de la Tunisie pour les crimes commis par les terroristes tunisiens.


 


Angélisme, ou droit-de-l’hommisme ?


Cantonné à un rôle honorifique dans le dispositif virtuellement semi-parlementaire voulu par ses alliés d’Ennahdha, le président provisoire se contente à l’intérieur d’un rôle d’arbitrage sur des questions diverses, dont récemment celle du casse-tête salafiste.


Ce week-end, il recevait au Palais de Carthage deux leaders de la mouvance djihadiste, selon le journaliste Soufiane Ben Farhat. Auréolé de son bilan diplomatique qui lui confère une légitimité certaine pour demander des concessions aux salafistes, il aurait exigé une reddition auprès d’une frange de plus en plus sonore et menaçante, vraisemblablement armée désormais selon nombre d’analystes.  


Marzouki mandaté par Ennahdha pour résoudre l’imbroglio salafiste ? Pas nécessairement si l’on en croit la conception assez particulière des droits de l’homme, partagée par le CPR et Ennahdha, celle-là même qui associe le niqab à la « liberté » et assimile le djihadisme à une opinion comme une autre.


A son retour samedi, le président n’a pas boudé son plaisir : il s’est livré à une cérémonie d’accueil en grande pompe. De quoi rappeler une certaine époque à beaucoup de Tunisiens. Même si la procédure est sans doute protocolaire, on a connu Marzouki plus iconoclaste.


Lui qui en 2011 affirmait encore qu’il n’avait que faire des honneurs du pouvoir semble décidément y prendre goût.


Seif Soudani