Tunisie/Elections. Partis indépendants et blogueurs en campagne à Paris

« Nous allons voter pour un projet qui va définir nos vies pendant une cinquantaine d’années,» déclare Rania Majdoud. À la tête d’une liste indépendante « Doustourna », elle insiste sur l’importance de ce scrutin. Nous sommes en pleine semaine mais la salle affiche complet. L’association ‘les Cahiers de la liberté’, très active durant cette campagne, organise une table ronde. Indépendants, blogueurs, militants ou simple curieux ont fait le déplacement. Les retardataires resteront debout. Les 80 places prévues ont été prises d’assaut. Dans le public, une majorité d’étudiants, réseaux sociaux obligent, prennent quelques notes.

Quelle place pour les indépendants?

Nadia Ayadi est ingénieur et blogueuse militante depuis mai 2006 : « Un grand bravo à tous les blogueurs qui ont oeuvré pour la Tunisie. Aujourd’hui ils veulent prendre part au processus de transition et ils rejoignent les listes indépendantes, c’est très bien. »

Un intervenant l’interpelle : « 1.500 listes dont 700 pour les seuls indépendants, sur 33 circonscriptions, vous ne trouvez pas que ça fait un peu beaucoup ? »

Sans sourciller, la militante répond du tac au tac : « Chacun à le droit de présenter ses idées sans entrer forcément dans un parti. Cette constitution sera un consensus, il faut que tous les tunisiens y prennent part, » avant de rajouter un brin fataliste : « Parfois certaines n’ont pas la même pertinence. Des listes reprennent juste les propositions des partis, et malheureusement ça risque de conduire à un éclatement des voix. »

Pour Maher Tekaya, militant syndical à l’UGTT(Union générale tunisienne du travail), pas de doutes : « Il y a un vrai problème de lisibilité sur la scène politique tunisienne, les électeurs ne s’y retrouvent plus. »

Des propositions similaires

Pour le programme complet, direction le site des partis. Ce soir, seules quelques propositions triées sur le volet seront dévoilées. Les violons s’accordent. « Il faut créer une cour constitutionnelle indépendante qui pourrait être saisie par tout citoyen en cas de litige ».

Pour Rania Majdoud : « Il faut réformer les institutions gangrénées par la corruption comme la police ou la justice. Pour ce faire nous voulons mettre en place une autorité indépendante de lutte contre la corruption. »

Mais comme pour beaucoup de partis, chacun veut créer un nouveau projet de société « qui consacrera les libertés individuelles » afin de pouvoir protéger chaque citoyen.

Maher Tekaya veut des hommes politiques qui ne soient pas mous : « Il faut un gouvernement efficace qui soit à l’avant garde. Des politiques qui n’aient pas peur d’aller contre l’opinion publique, à l’image de l’abolition de la peine de mort en France en 1981. Peu de gens soutenaient le projet. »

Sans oublier « l’équité entre les régions ». Là, tout le monde le reconnaît, « il faut distribuer les richesses de manière égalitaire dans chaque région ». Nadia Ayadi y voit déjà un motif d’espoir : « Voilà un moyen de créer dans chaque région des lieux de travail afin de lutter contre le chômage. »

Avant de rajouter pleine d’émotions : « On a eu 50 ans de dictature, à chaque fois une seule liste, une seule couleur. Profitons de ce moment Historique pour donner un second souffle à notre Tunisie. »

Jonathan Ardines

Sur la photo: Table ronde entre indépendants tunisiens à Paris