TUNISIE – Elections : état des lieux des forces en présence Aujourd’hui, fin du délai de dépôt des candidatures
Aujourd’hui 7 septembre à minuit, les jeux seront faits : tous les candidats aux élections historiques de l’Assemblée Constituante seront connus… de l’ISIE. Resteront en effet 4 jours jusqu’à la publication officielle et définitive des listes électorales à l’adresse du grand public.
Le Courrier de l’Atlas a contacté des membres de l’Instance Supérieure Indépendante des Elections ainsi que plusieurs candidats représentant divers partis politiques aux élections, pour une mise au point concernant les différentes forces en présence selon les circonscriptions et quelques aspects techniques utiles.
Les principales têtes d’affiche
Premier fait marquant qui ressort du bilan des candidatures, c’est Tunis 2 qui se dégage du lot comme étant la circonscription des listes de stars, plus encore que Tunis 1 qui compte aussi quelques pointures. C’est un véritable match des titans qui se prépare en effet à Tunis 2, quelques-unes des plus grandes formations ayant aligné les têtes de liste suivants :
– PDP : Ahmed Nejib Chebbi (numéro 1 du parti)
– POCT : Radhia Nasraoui (épouse du fondateur du parti)
– Alliance Démocratique pour l’Avenir : Abdelfattah Mourou (transfuge d’Ennahdha)
– Ennahdha : Souad Abd Errahim (finalement une des rares femmes tête de liste du parti islamiste)
– Afek Tounes : Mohamed Louzir (président du parti)
La circonscription Tunis 1 compte aussi son lot de poids lourds :
– PDP : Moncef Chikhrouhou : (numéro 3 du parti, économiste renommé et titulaire du Vernimmen pour « l’excellence de son enseignement » dans les programmes du groupe HEC Paris).
– Ennahdha : Hamadi Jebali (secrétaire général, numéro 2 du parti)
– Ettakatol FDTL : Mustapha Ben Jaafar (fondateur du parti)
– CPR : Samir Ben Amor (porte-parole du parti)
Quant aux autres têtes d’affiche, Issam Chebbi, le frère d’Ahmed Néjib Chebbi et représentant du PDP au sein du CISROR, se présente à l’Ariana. Maya Jribi, numéro 2 du PDP, se présentera quant à elle à Ben Arous (principale circonscription de la banlieue sud de Tunis), où elle devra affronter le populaire Noureddine Bhiri, porte-parole d’Ennahdha… Le controversé Moncef Ben Salem d’Ennahdha se présente dans sa ville natale, circonscription Sfax 2. Autre membre du comité exécutif d’Ennahdha, Samir Dilou figurera sur la liste électorale à Bizerte. Enfin, bien qu’étant originaire du sud tunisien, Moncef Marzouki, chef du Congrès Pour République, a choisi quant à lui de se présenter à la circonscription Nabeul 2.
Afek Tounes, fortement actif à l’étranger
Pour beaucoup « parti des cols blancs » et des Tunisiens des grandes écoles, Afek Tounes a brillé depuis le début de la précampagne par une présence accrue à l’étranger où il occupe le terrain surtout en France auprès de la grande communauté tunisienne à Paris et ailleurs.
Ainsi le parti a très tôt aligné sur la liste France 1 la sémillante Najoua Bennaceur qui sillonne déjà les marchés parisiens à la rencontre de compatriotes, et Raed Makni, un militant d’origine sfaxienne (comme beaucoup de membres fondateurs du parti) sur la liste de la circonscription Pays Arabes, dont l’instance régionale se trouve à Abou Dhabi.
Par ailleurs, une tribune du célèbre site participatif Nawaat qui fait depuis deux jours le buzz sur le web tunisien a défrayé la chronique par sa teneur polémique. Le jeune militant Ali Gargouri y fait part de son coup de gueule, après avoir claqué la porte du parti, très remonté de ne pas avoir été confirmé à la tête de la liste France 1 (France Nord). C’est le comité central qui depuis Tunis a souhaité le voir remplacé par Najoua Ben Nasr, motif : le profil et l’éthique personnelle de Gargouri déplaisent au sommet de la hiérarchie, le militant ayant été aux prises avec les forces de l’ordre françaises lors des événements de l’occupation du 36 rue Botzaris, et la subtilisation des archives du RCD.
Une décision politique qui n’est pas du goût de l’intéressé, d’autant qu’il aurait joué un rôle important dans le soutien logistique apporté aux jeunes tunisiens arrivés de l’île de Lampedusa.
Elections de la Constituante, et après ?
Avec le retour sur la table de la question des prérogatives non délimitées de la future Assemblée Constituante évoquée hier par Béji Caïd Essebsi dans son discours, se pose avec de plus en plus d’insistance la question de la durée et la nature de ses pouvoirs.
Contacté par nos soins, Sami Ben Slama, responsable des affaires juridiques de l’ISIE, nous confirme que la période d’un an dont certains partis politiques parlent n’est qu’une simple demande de ceux-ci, mais qu’au final c’est l’Assemblée elle-même qui déterminera la durée de son propre mandat et le temps nécessaire à la rédaction d’une nouvelle constitution.
Reste la question de l’élection d’un président de la république. Sami Ben Slama nous assure également que, conformément au nouveau décret-loi 35 régissant le code électoral « la future assemblée, forte de la légitimité du vote populaire, est souveraine pour choisir la nature du régime (présidentiel, parlementaire, etc.) et organiser les élections conformément à cela ».
Autre précision, beaucoup pensent que du simple fait de l’élection d’une assemblée, l’actuel gouvernement provisoire devra partir, de facto. Faux répond le membre de l’ISIE. Même s’ils venaient à démissionner, ils resteraient à leurs postes, en attendant potentiellement jusqu’à des mois avant que l’Assemblée ne nomme un nouveau chef de l’Assemblée elle-même, puis un nouveau gouvernement… Les pouvoirs du chef du gouvernement provisoire et de ses ministres seront en attendant réduits à l’expédition d’affaires courantes (sachant qu’ils gouvernent actuellement par ordonnance).
Seif Soudani