Tunisie- Des salafistes jihadistes assument l’attaque du cinéma Afric’art

Qui sont les auteurs de l’attaque contre le cinéma Afric’art fin juin à Tunis?

Des islamistes, si l’on en croit leur apparence et leurs slogans, disent certains.

D’autres avancent une thèse différente :

-ce seraient des milices du RCD qui continueraient à provoquer la zizanie et les troubles entre Tunisiens ;

-ou alors, ce seraient des membres de la police politique qui cherchent à discréditer les islamistes pour mieux les réprimer. D’ailleurs, vous trouverez toujours quelqu’un qui connaît quelqu’un qui jure avoir vu des barbes postiches tomber car la colle qui les tenait n’était pas assez puissante.

La réalité, c’est que parmi nous en Tunisie, vivent et agissent désormais au grand jour, des individus qui se réclament (et en tirent fierté) du salafisme jihadiste, mouvance qui se revendique non seulement du salafisme mais également de la violence. Des salafistes jihadistes tunisiens revendiquent sur la toile, l’opération du cinéma Afric’art et différentes autres actions comme nous allons le voir.

Nous nous sommes rendus sur l’un des forums jihadistes les plus connus (voir fac similé). Un certain « Assadoulislam » (Lion de l’Islam, qui fut le pseudo de Zarquaoui) poste un court texte avec plusieurs liens vidéos, le 29 juin dernier. En voici les grandes lignes :

« Voici quelques vidéos des cheikhs du courant jihadiste en Tunisie. Ce sont Abou Iyadh, l’idéologue de la salafiya jihadia en Tunisie, élève du cheikh palestinien Abou Qatada ; et de cheikh Abou Ayoub. Ces vidéos ont été tournées au cours du sit-in organisé hier à Tunis devant le palais de la justice pour exiger la libération des frères qui ont été arrêtés lors des événements de l’Afric’art. Mais les apostats de la police ont attaqué nos frères, les ont agressés et ont arrêté une trentaine appartenant au courant jihadiste. (…) Vendredi prochain, une grande manifestation sera organisée au cœur de Tunis à l’appel de Cheikh Al Khatib Al Idrissi et de Cheikh Abou Iyadh ». (Suivent différentes liens vidéos).

Nous reviendrons sur les activités des salafistes jihadistes tunisiens sur la toile, et en particulier dans les forums les plus virulents et les plus extrémistes.

Plusieurs remarques s’imposent :

Ennahdha ne doit pas être confondue avec la mouvance salafiste. La mouvance salafiste excommunie Ennahdha et ses dirigeants, présentés dans les forums et autres communications, comme impie. Ennahdha, du moins dans ses positions officielles, accepte le jeu démocratique et l’Etat séculier. Ce n’est pas le cas des salafistes.

-Les salafistes ne sont pas non plus une mouvance monolithique. Il y a plusieurs groupuscules, tendances et courants et les uns n’hésitent jamais à excommunier les autres.

-En gros, on peut distinguer deux sortes de salafistes :

1. les salafistes de prédication qui veulent islamiser la société par le bas ; quand ils opèrent dans un pays où le régime se réclame plus ou moins de l’Islam, ils respectent le régime établi, ils sont légalistes.

2. les salafistes jihadistes qui prônent l’action armée.

Ce sont ces derniers qui revendiquent l’attaque du cinéma Afric’art fin juin à Tunis.

Combien sont-ils ? au maximum quelques centaines dans toute la Tunisie.

Quels sont leurs chefs ? les plus connus, ceux qui revendiquent ouvertement leurs positions, sont au nombre de trois :

-Abou Iyadh, compagnon du palestinien Abou Qatada, ancien jihadiste en Afghanistan, arrêté en Turquie vers 2003 qui l’a extradé vers la Tunisie où il avait été condamné à 43 ans de réclusion. Libéré en mars dernier grâce à la révolution.

-Abou Ayoub : a séjourné en France de 2007 à 2010 avant d’être expulsé vers la Tunisie.

-Alkhatib Al Idrissi.

On peut citer cinq autres dont se revendiquent les salafistes jihadistes tunisiens : Abou Jihad Kamel Marzouki (qu’on peut croiser trois fois par semaine dans une école coranique d’Ennasr II), Bechir Ben Hassan, Abou Abdallah Mdhaffar, Anis attounoussi, Khemais Majeri.

Soufia Limam