Tunisie. Congrès unificateur PDP – forces démocrates centristes : les modernistes s’organisent

 Tunisie. Congrès unificateur PDP – forces démocrates centristes : les modernistes s’organisent

Ce congrès


En Tunisie, la réorganisation des forces progressistes se poursuit. Un temps nommé « l’Arlésienne », le grand congrès unificateur des partis du centre / centre-gauche a non seulement tenu ses promesses, mais s’est transformé en un lieu de rendez-vous de l’ensemble de l’opposition au gouvernement de la troïka, syndicats et société civile y compris. 




 


Hors RCD, ex parti unique, très peu de partis politiques tunisiens peuvent revendiquer un nombre de congrès supérieur à 1. Le Parti Démocrate Progressiste en était aujourd’hui à son 5ème, mais aussi son dernier en tant que « PDP ».


S’étalant sur 3 jours, ce congrès, à valeur d’acte fondateur d’un nouveau méga parti, s’ouvrait ce samedi après-midi dans la salle tout aussi historique du Colisée, au cœur de la capitale, dans une ambiance extrêmement tendue. Les 8 et 9 avril verront l’élection, à Sousse, de ses nouveaux dirigeants.


 


L’aubaine politique des mouvements sociaux


Les traces des affrontements de la matinée entre jeunes chômeurs et forces de l’ordre étaient encore visibles au moment où nous arrivons au niveau de l’Avenue Bourguiba. Des pierres jonchaient le sol, et la présence policière se faisait toujours sentir.


Bravant l’interdiction du 28 mars par le ministère de l’Intérieur de manifester Avenue Bourguiba, l’Union des Diplômés Chômeurs avait tenté de marcher sur l’avenue, et a rencontré une répression certes prévisible, mais d’une violence inédite depuis la révolution.


Il n’en fallait pas plus pour que ces évènements accaparent une bonne partie des allocutions des intervenants, devant une base militante chauffée à blanc.


Quelques centaines de « JDP », jeunesses du PDP, ont interrompu les discours de slogans reprenant ceux de la révolution du 14 janvier 2011, dont « Travail, Liberté, Dignité ! », ou encore « Fidèles au sang des martyrs », référence à un autre épisode noir récent de la répression des blessés de la révolution.


C’est Maya Jribi, la plus applaudie des leaders du parti, qui la première a évoqué l’idée de la nécessité de se réapproprier l’Avenue Bourguiba, haut symbole de la révolte : « Nous serons les premiers à marcher le 9 avril, fête des martyrs, sur cette avenue qui est la nôtre, celle du peuple, et dont le ministère de l’Intérieur n’aura plus jamais le monopole », lança-t-elle sur le ton de la défiance.


 


Un mea culpa décomplexé


Outre la diversité des invités présents, parmi lesquels des leaders syndicalistes et de prestigieux intellectuels dont Yadh Ben Achour et Hélé Béji, ce qui frappe d’emblée à cette grande messe politique, c’est l’étonnante franchise avec laquelle un bilan a été dressé des erreurs du passé.


Sans langue de bois aucune, Maya Jribi a ainsi reconnu : « Nous avons par le passé mal saisi la nature des défis qui se présentaient à nous, des préoccupations populaires, et même de la phase post révolution, à commencer par notre campagne électorale ». Elle faisait référence à une campagne d’affichage particulièrement impopulaire de posters géants la montrant aux côtés de Néjib Chebbi, qui avait rappelé à beaucoup de Tunisiens le culte de la personnalité d’une ère révolue.


Toujours tirant les leçons des fautes du passé, les intervenants qui lui succédèrent, de Mohamed Louzir, chef de l’ex Afek Tounes, à Iyed Dahmani, tous ont mis l’accent sur l’urgence d’une réorientation plus populaire du nouveau mouvement centriste. « En l’absence de contact plus poussé dans les régions avec les travailleurs et les masses populaires, rien ne se fera : nous serons condamnés à être perçus comme une élite déconnectée des réalités sociales », a martelé Néjib Chebbi.


Une semi annonce politique de ralliement concret mais futur a enfin été faite par Ahmed Brahim, qui représentait le courant plus à gauche de la récemment créée coalition de la Voie Démocratique et Sociale.


De quoi faire trembler le gouvernement en place, dominé par Ennahdha, désormais cerné par une force dont on sent bien qu’elle peut peser lourd aux prochaines élections. Surtout si elle agrège avec elle les ex destouriens de Béji Caïd Essebsi, grands absents aujourd’hui.


 


Seif Soudani


Reportage photo :


https://www.facebook.com/media/set/?set=a.425199364160687.112118.120372914643335


Reportage vidéo :


http://www.youtube.com/watch?v=zBLIX6KHfnA