Tunisie. Célébrations du 1er anniversaire de la révolution: la fête l’emporte sur la politique

 Tunisie. Célébrations du 1er anniversaire de la révolution: la fête l’emporte sur la politique

Beaucoup de jeunes étaient drapés dans le drapeau national

L’Avenue Habib Bourguiba était noire de monde samedi 14 janvier 2012 pour les commémorations du premier anniversaire de la révolution du Jasmin. Sur place, nous avons pu constater que malgré quelques tentatives de récupération politique, c’est l’ambiance globalement bon enfant qui a prévalu.

 

Des Tunisiens de tous les âges et toutes les classes sociales ont spontanément afflué par milliers, venant des quatre coins du pays, pour rendre hommage à leur révolution et au sang versé par les martyrs, en ce haut lieu symbolique qu’est devenue l’Avenue Habib Bourguiba.

Transformée l’espace d’une journée en un lieu de pèlerinage, sorte de sanctuaire interdit à la circulation, « l’Avenue » n’aura même pas nécessité de présence policière notable, en ce jour pourtant très sensible où l’on pouvait craindre des débordements, au vu de la foule politiquement hétéroclite qui l’a sillonnée.

Comme d’un commun accord, les Tunisiens semblaient avoir décidé que rien ne saurait gâcher « leur » fête. Une auto gestion unanimement saluée tel un exemple de civisme.

Mais cette trêve tacite n’a pas pour autant empêché que se forment des cercles de débats politiques passionnés sur les trottoirs, signe que l’explosion de la parole est encore d’actualité, un an après la fin du joug du mutisme.

Globalement, c’est l’exaltation du sentiment patriotique qui aura primé : beaucoup de jeunes étaient drapés dans le drapeau national, d’autres ont escaladé arbres et lampadaires pour faire flotter le plus haut possible le drapeau, confirmant que le nationalisme a le vent en poupe. Un nationalisme dans ce qu’il a de plus convivial cela dit, et de moins idéologique, la fierté nationale exprimée semblant davantage être puisée dans la primeur révolutionnaire.

Les slogans apolitiques étaient légion : « Ni partis, ni slogans ! », pouvait-on entendre tout au long de la journée. Un refus de la politique partisane en ce jour de communion.

 

Un rejet de la politique pas du goût de tous

Quelques provocations ont néanmoins été constatées. Elles sont quasiment toutes le fait de fondamentalistes religieux.

Si la présence du parti Ennahdha était visible au travers de quelques timides tentatives de récupération au travers de banderoles brandies ou accrochées ici et là par ses militants, ce sont les drapeaux noirs salafistes qui, une fois encore, ont fait une incursion remarquée.

Un hors sujet qui a exaspéré tous ceux pour qui « seul le drapeau tunisien devait flotter aujourd’hui », comme ils nous l’ont affirmé plus d’une fois.

Des incidents isolés ont par ailleurs opposé des passants à des journalistes de la chaîne Al Arabiya TV, chassés à coups de « Arabiya dégage ! ». Selon beaucoup de Tunisiens, la chaîne saoudienne venait de se rendre coupable la veille d’un documentaire romancé sur les derniers jours de Ben Ali, suspecté d’être trop complaisant vis-à-vis d’un personnage présenté comme presque sympathique et touchant.

Quoi qu’il en soit, il était acquis au terme d’une journée de festivités qu’une véritable tradition est née. Plus qu’un jour férié, le 14 janvier devient ce jour où chaque année la Tunisie se rappelle qu’elle est l’épicentre de quelque chose qui la dépasse, désormais le centre du monde pour tous les autres peuples arabes et d’ailleurs, aspirant à la liberté et aux valeurs démocratiques universelles.

Reportage photo : https://www.facebook.com/media/set/?set=a.361807497166541.99893.120372914643335

Seif Soudani