Syrie : Polémique autour d’un documentaire produit par la TV française

 Syrie : Polémique autour d’un documentaire produit par la TV française

Samah Soula


 


Diffusée jeudi 18 février sur France 2, l'émission Un oeil sur la planète consacrée à la Syrie est vivement critiquée pour son parti-pris pro-régime syrien. S’il est source d’indignation, le documentaire réalisé par Samah Soula est salué par les pro-régime Al Assad. « Il est en réalité à l'image d'un certain débat public actuel, qui lit de nombreux conflits à l'étranger à travers un prisme tronqué, foncièrement islamophobe et occidentalo-centré », écrit Marie Peltier dans l’Express. Quand France 2 se fait le porte-voix de Damas. Décryptage.




 


Dès les premières minutes du docu, on comprend que l'axe principal consiste en une démonstration bancale selon laquelle la nécessité du départ de Bachar al Assad ne serait qu'une lubie des dirigeants occidentaux « aveuglés », d'où le titre du documentaire « le grand aveuglement »…


En une heure et demie de vidéo, une petite phrase seulement sur les barils explosifs largués quotidiennement par le régime sur les populations civiles. Georges Malbrunot ainsi qu’un journaliste algérien pourtant ancien détenu du régime nous expliquent même que Bachar « est un président populaire et aimé », avec tout de même une nuance, « par les populations de la classe moyenne urbaine ». « S’il avait organisé des élections libres, il les aurait gagnées », nous explique-t-on.


 


Le mythe du paradis féministe et laïque pour minorités


A mi-docu, dans un luxueux restaurant parisien, Samah Soula a rendez-vous avec une ex reporter du Monde. C’est alors que l'idée du régime « protecteur des minorités » est relayée, sans aucune évaluation critique, ni allusion au prix de cette paix civile factice qui se faisait déjà moyennant la torture systématique dans les geôles du régime.


Pas un mot non plus sur la stratégie de pourrissement du conflit par régime baathiste, ni les chiffres de son génocide (260 000 à 300 000 civils tués essentiellement par les forces du régime). Du coup la radicalisation des rebelles est présentée comme complètement gratuite, parachutée sur le pays, l'auteur du documentaire ignorant visiblement le principe universel du droit imprescriptible au droit des peuples à l'auto défense, y compris armée.


On nous présente également les rebelles comme étant exclusivement des groupes de mercenaires, infiltrés par des étrangers, avec une focalisation sur les attentats suicides, et même un lien avec les attentats de Paris, tel un "appeal to emotion".


A la fin du documentaire, lorsque la journaliste interroge les migrants, elle demande en premier lieu et de façon orientée « est-ce que vous fuyez Daech ». Même lorsque la stratégie méthodique de la famine est évoquée, la voix off prend bien soin de préciser que « les insurgés ont également employé cette méthode »…


Le régime n'en demandait pas tant. Au final on ne voit pas trop où l'auteur du docu veut en venir. Quoique une phrase d'un réfugié peut nous renseigner sur la dimension nostalgique de la chose : « J'aimerais que la Syrie redevienne comme avant ». Nous voilà fixés.


 


Seif Soudani