Réseaux sociaux. Les salariés peuvent-ils critiquer leur employeur sur Facebook ?
Pour la première fois en France, une juridiction pénale a statué sur les risques encourus par les salariés coupables de dénigrement à l’encontre de leur hiérarchie sur les réseaux sociaux.
Par jugement du 17 janvier 2012, le Tribunal Correctionnel de Paris condamnait un salarié, au paiement d’une amende délictuelle de 500€ avec sursis, outre 1€ de dommages-intérêts, pour avoir injurié publiquement sa direction sur Facebook.
Constituées parties civiles, les employeurs avaient poursuivi ledit salarié pour avoir diffusé sur l’une de leurs pages Facebook, des propos qu’ils considéraient constitutifs d’un délit d’injures publiques, au sens de l’article 29 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881.
Le prévenu avait été cité à comparaître, sur le fondement particulier des deux phrases suivantes : « Journée de merde, temps de merde, boulot de merde, boîte de merde, chefs de merde… », « Ben j’aime pas les petits chefaillons qui jouent au grand ».
Il a indiqué avoir posté ces mots en réaction au conflit qui opposait depuis la veille, les militants syndicaux à la direction de l’entreprise, laquelle avait refusé de diligenter une enquête suite au suicide d’une salariée.
Au soutien de sa relaxe, il arguait de l’excuse de provocation telle que définie à l’article 33 alinéa 2 de la loi susvisée, invoquant également sa liberté d’expression syndicale lui permettant d’exercer plus librement la critique de son employeur.
Pourtant, le juge décidait de faire droit aux moyens de l’entreprise, qui faisait valoir le préjudice considérable dont elle était victime, eu égard au caractère public et accessible du message en cause.
Le magistrat a considéré que les propos litigieux du salarié comportaient des termes clairement insultants voire vexatoires à l’encontre de ses employeurs, destinés à leur nuire et porter atteinte à leur dignité.
Dès lors, il a jugé que les phrases diffusées sur Facebook excédaient les limites de la critique admissible et devaient être qualifiées d’injurieuses, l’excuse de provocation en l’espèce non fondée ne pouvant soustraire le salarié, tout représentant syndical qu’il était, à une condamnation pénale.
Cette décision s’inscrit dans la droite lignée d’une jurisprudence de plus en plus abondante, qui condamne le dénigrement d’un employeur par l’un de ses salariés sur un réseau social, que cet acte soit réalisé en dehors du temps et du lieu de travail ou non.
Rappelons à ce titre que le Conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt avait déjà admis que le fait d’injurier sa hiérarchie sur les réseaux sociaux, justifiait un licenciement pour faute grave.
Par Maître Haïba Ouaissi
Cabinet Cassius Partners
www.cassiuspartners.com