ONU – La diatribe annuelle d’Ahmadinejad commence à lasser
Le discours habituellement polémique du président iranien était particulièrement attendu en cette année où l’Assemblée générale de l’ONU se penche sur la proposition palestinienne d’un État palestinien souverain. Mais non seulement Mahmoud Ahmadinejad évita soigneusement la question, le ton de la défiance et des charges anti occidentales ont cette fois parus bien déconnectées des réalités, trop prévisibles, et font dire à beaucoup d’observateurs qu’il serait temps que l’intéressé change de rédacteur de discours.
Pas un mot sur la Palestine
Après une tirade fleuve aux accents métaphysiques à propos de « la place de l’Homme dans l’univers dont tout le monde sait qu’elle lui est conférée par un don divin », le président iranien se livre à une attaque en règle, toujours plus véhémente, tour à tour contre l’Occident, l’Europe, les Etats-Unis et « le sionisme » qu’il accuse une fois encore de tous les maux de la terre.
« Si des pays européens utilisent toujours l’Holocauste après six décennies comme excuse pour payer leur amende aux Sionistes, les puissances coloniales et les esclavagistes ne devraient-ils pas payer des réparations aux nations affectées ? ». C’est au fil de ces paroles que les délégations occidentales ont commencé à quitter la salle, dans un ballet désormais familier mais plus important que les années précédentes où certains considéraient qu’un tel discours ne faisait que « pimenter les débats ».
La question de l’initiative palestinienne a en outre brillé par son absence : tout comme le Hamas, l’Iran ne soutient en effet aucune démarche reconnaissant même implicitement l’existence d’Israël. Une position radicale qui n’a pas les moyens de sa politique et cache mal le malaise d’une fuite en avant d’un régime mal en point qui prend en otage un peuple en proie aux sanctions économiques. Position caractéristique de ceux qui n’ont plus grand-chose à perdre, contrairement à un Hamas dont le silence est en revanche davantage politique, avec une posture attentiste qui a tout d’un positionnement stratégique pour affaiblir un peu plus Mahmoud Abbas, président aux abois de l’autorité palestinienne.
Pas un mot non plus sur les révolutions arabes, des révolutions probablement trop similaires à celle qui secoua son propre pays dès 2009 et qu’il réussit à mâter grâce notamment à la même rhétorique souverainiste, en faisant juger la plupart des insurgés contre son régime pour complot avec des puissances étrangères.
Au bout de 12 minutes d’un discours bateau, Ahmadinejad se trouvait quasiment seul dans l’enceinte de la salle accueillant l’assemblée, seules quelques délégations africaines et asiatiques étaient encore là pour écouter en boucle les mêmes obsessions.
Plus que jamais isolé, littéralement esseulé face à une salle vide, la symbolique mise en valeur par cette absurde cacophonie est celle d’un Iran plus que jamais en décalage avec son temps, en porte-à-faux surtout avec la dynamique révolutionnaire qui agite une région du monde à ses portes et qui cette fois se dérobe à un argumentaire désuet et obsolète de la « faute aux autres ».
Seif Soudani