Maroc. Nouvel Exécutif pour anciennes problématiques
Aujourd’hui lundi, à plus d’un mois du scrutin de novembre dernier, le nouveau gouvernement devrait enfin voir le jour dans sa version définitive, dirigé par les islamistes modérés du PJD. La tâche ne sera pas facile pour cet Exécutif, qui ne commence pas vraiment 2012 sous les meilleurs auspices…
C’est aujourd’hui lundi que les Marocains devraient connaître la composition définitive de leur gouvernement, le premier dans l’histoire du pays à battre pavillon islamiste.
Comme le veulent les us politiques du pays, le palais royal a en effet validé la liste des « ministrables », mettant ainsi fin à un peu plus d’un mois de tractations entre les principaux partis de la majorité gouvernementale (PJD, Istiqlal, PPS et MP).
Pour le Marocain lambda, ce n’est pas tant l’identité des ministres qui importe le plus, mais plutôt le degré de cohésion entre les membres du gouvernement Benkirane et leur capacité à « ramer dans la même direction », en faisant abstraction de toute autre considération politique.
Comme pour rappeler au nouveau premier ministre Abdelilah Benkirane l’ampleur des attentes et des enjeux, des manifestations ont eu lieu dans les principales villes marocaines hier dimanche 1er janvier, en réponse à l’appel du Mouvement 20 février.
Si Benkirane s’est engagé à mettre en place les conditions adéquates à une croissance économique durable, censée découler sur une amélioration des conditions sociales des citoyens, force est de constater que le Maroc ne démarre pas l’année 2012 avec les meilleurs atouts en main.
Abdellatif Jouahri, gouverneur de la Banque centrale marocaine, avait déclaré fin décembre que « le succès politique (des élections) devait être prolongé par un succès économique ». Une tâche ardue, pour un pays dont les principaux partenaires commerciaux essuient encore les retombées de la crise de la zone euro…
Croissance et compensation
Paradoxalement, le gouvernement Benkirane entame cette année 2012 sans Loi de finances. Bien que déposée au Parlement par le gouvernement sortant, la LF 2012 n’a pas été discutée par les députés. Ce qui ne manquera pas de chambouler l’agenda du nouvel Exécutif, des sources internes au PJD estimant qu’ils ne pourront réellement travailler qu’à partir du 2ème trimestre de cette année.
Pour ce qui est des prévisions de croissance pour 2012, la Banque centrale marocaine table sur un taux compris entre 4 et 5%. Une croissance qui mise beaucoup sur la demande intérieure pour redresser l’économie. Un objectif qui reste tributaire du niveau de maîtrise de l’inflation, autour de 1,5%.
Si ces prévisions sont jugées « raisonnables » par les économistes, leur réalisation demeure incertaine dans un contexte international marqué par l’instabilité politique et économique, notamment en ce qui concerne le cours des matières premières.
La Caisse de compensation, qui veille à stabiliser les prix du carburant et des produits de première nécessité, a clôturé l’année 2011 en dépassant les 46 milliards de dirhams. Un véritable boulet qui tire l’économie marocaine vers le bas, et qui fait partie des priorités du gouvernement mené par le PJD, dont les ténors ont déclaré « qu’ils n’hésiteraient pas à faire preuve de courage politique pour réformer le système de compensation ».
En clair, il faut peut-être s’attendre en 2012 à un nouveau round du dialogue social et peut-être même à une révision des prix à la hausse. Ce ne sera pas sans conséquences sur de larges franges de la population marocaine, dont le revenu ne permet au mieux que de vivoter.
Pendant ce temps, les manifestants continuent de battre le pavé en dénonçant les rentes et privilèges dont bénéficient les proches du Makhzen économique…
Zakaria Boulahya