Maroc – Elections 2011, le PJD largement en tête

 Maroc – Elections 2011, le PJD largement en tête

Abdelilah Benkirane

Bien que les résultats ne soient pas définitifs, le PJD islamiste est bien parti pour gouverner le royaume, coiffant au poteau des partis en manque de crédibilité.

Bien que les résultats définitifs ne seront communiqués que ce samedi soir, tout indique que le Maroc, à l’instar de la Tunisie voisine, battra désormais pavillon islamiste.

Cette échéance électorale, la première depuis la réforme qu’a connue la constitution marocaine, vient confirmer la tendance islamiste post-Printemps arabe. Un scénario inattendu puisqu’en cas de validation de ces résultats, c’est parmi les barbus que Mohammed VI devra choisir son premier ministre, nouvelle constitution oblige.

Des islamistes très déterminés

Le parti Justice et développement, islamistes modérés dont le chef de file n’est autre que Abdelilah Benkirane, a réalisé de bons résultats dans les principales villes marocaines. Le PJD a même devancé Taieb Cherkaoui, ministre marocain de l’Intérieur, en s’autoproclamant grand gagnant de ces élections.

Il est vrai que si l’on se fie aux résultats préliminaires, quelque 90 sièges ont été remportés par le parti de la Lampe (à l’heure où nous mettions en ligne cet article) auxquels s’ajouteront les sièges obtenus au titre de la liste nationale (jeunes et femmes). Au total, on parle de 100 à 120 sièges, soit 25 à 30% du Parlement. Une victoire avec panache puisque dans de nombreuses circonscriptions, les élus PJD ont surclassé les candidats des autres formations en termes de voix.

Qu’ils appartiennent à la Koutla ou au G 8, de gros calibres du champ politique marocain se sont vus malmenés dans leur propre fief.

Karim Ghellab, Yasmina Baddou (Istiqlal) ou encore l’ex-futur premier ministre Salaheddine Mezouar (RNI) ont in extremis arraché leurs circonscriptions des griffes de candidats PJD, plus déterminés que jamais…

45% de participation

Ces résultats préliminaires sont toutefois à remettre dans leur contexte. En commençant  par le taux de participation, qui pointe à 45 %. Ce dont s’est félicité le ministre marocain de l’Intérieur, Taieb Cherkaoui, qui s’est fendu d’un communiqué officiel à l’occasion.

Un taux de participation qui a suscité nombre de commentaires sur la toile, particulièrement sur les réseaux sociaux. Il est certes supérieur aux 37% réalisés en 2007, mais il ne faut pas oublier que le nombre d’inscrits sur les listes électorales a également diminué de presque 2 millions entre 2007 et 2011.

Il faut reconnaître que les Marocains ne se sont pas vraiment pressés aux urnes vendredi. La principale raison reste toutefois la défiance des Marocains face à la chose politique. Mêmes candidats, mêmes discours qui ne convainquent plus grand monde…

En l’absence de profils crédibles, le peuple s’est tourné vers les islamistes pour des raisons évidentes. Un vote-sanction en faveur du PJD qui, sur le papier, est paradoxalement le moins apte à prendre les rênes du gouvernement, son expérience se limitant à la gouvernance locale.

Le dépouillement des bulletins de vote devrait permettre d’y voir plus clair, en dégageant le taux de participation du monde rural, et surtout celui des MRE, dont plusieurs associations ont appelé au boycott suite à la mise en place du vote par procuration.

Le jeu des alliances

Du côté des partis, les neurones s’échauffent à imaginer des alliances. Même si la victoire du PJD est confirmée, avec un premier ministre issu de leurs rangs, les islamistes n’auront jamais les coudées franches.

La fragmentation du champ politique au Maroc est telle qu’avec plus de 30 formations politiques, dont un bon nombre de partis « administratifs » (comprenez : qui roulent pour le pouvoir en place), les PJDéistes se verront contraints de conclure des alliances pour survivre.

Les sièges théoriquement remportés par le parti de la Lampe  ne lui permettront pas de constituer une majorité, dans un parlement composé de 395 sièges. Les analystes politiques voient en l’Istiqlal, ou encore en l’USFP les partenaires « naturels » des barbus, pour le meilleur et pour le pire…

Zakaria Boulahya