France. VIH et tuberculose : les migrants en première ligne

 France. VIH et tuberculose : les migrants en première ligne

Alors que la précarité sociale et économique dans laquelle vivent certains immigrés les expose aux pathologies transmissibles

Selon le rapport publié hier mardi par l’Institut de veille sanitaire (InVS), la moitié des découvertes de séropositivité et des cas de tuberculose en 2009 concernait des migrants. Une étude qui pointe du doigt une évidente inégalité dans l’accès aux soins médicaux.

 

L’étude conduite par Florence Lot, chercheuse à l’Institut de veille sanitaire (InVS), est édifiante. En 2009, les taux de découvertes de séropositivité et de tuberculose étaient de 8 à 10 fois plus élevés chez les personnes nées à l’étranger que chez les non-migrants. Sur les 6 700 cas de séropositivité au virus du sida comptabilisés cette année là, 48% concernaient les migrants.

Le taux est quasiment le même pour les personnes atteintes de tuberculose. Sur les 5 276 cas déclarés, la moitié concernait des personnes récemment installées en France.

Des chiffres qui grimpent pour les patients ayant contracté l’hépatite B, « Parmi les 1 715 patients pris en charge pour une hépatite B chronique en 2008-2009, les trois-quarts étaient migrants », affirme le rapport.

Rien d’étonnant pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui rappelle que ces pathologies lourdes sont toutes présentes en Afrique subsaharienne. Cette population représentait selon l’Insee un peu plus de 12% des 5,3 millions de personnes immigrées vivant en France en 2007.

« Les populations immigrant en France ont donc un risque d’exposition et d’infection plus élevé lorsqu’elles sont originaires de ces régions », précise le rapport.

 

Une différence de traitement

Autre point très intéressant de cette étude, l’évolution de ces cas depuis 2009. Le nombre de cas de tuberculose chez les immigrants « est resté relativement stable ». Pendant ce temps, le nombre a chuté chez les personnes nées sur le territoire français.

« Les migrants ont un moindre accès à la prévention dans leur pays d’origine et peut-être aussi en France », affirment les chercheurs. La précarité sociale et économique dans laquelle vivent certains immigrés explique en partie ces chiffres.

Mais c’est surtout l’accès aux soins et à la prévention pour cette couche de la population qui pose question. Concernant le VIH, l’étude dévoile « qu’au moins 1 migrant d’Afrique subsaharienne sur 5 a été contaminé en France ». Les femmes migrantes sont aussi « particulièrement exposées » avec des risques de périnataux, de diabète et un dépistage insuffisant du col de l’utérus.

Ce qui inquiète le plus, c’est que, depuis 2009, l’accès aux soins n’a pas été facilité par le gouvernement. Le projet de loi sur l’immigration adopté l’an dernier au parlement précise que les sans-papiers ne peuvent être soignés en France que si le traitement n’existe pas dans leur pays d’origine.

Le budget 2011 a instauré un forfait annuel de 30 euros par an pour bénéficier de l’Aide médicale d’Etat (AME). Des conditions pas toujours faciles pour des personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Jean-François Corty, directeur des missions France de Médecins du Monde dénonçait déjà l’an dernier une « instrumentalisation de la médecine à des fins xénophobes ».

Un rapport de l’inspection général des Finances (IGF) et des Affaires sociales (Igas) publié en janvier 2011 confirmait que ce droit d’entrée était « porteur de risques sanitaires ».

Dans ce rapport, ils tentaient d’alerter les autorités, rappelant que « si les bénéficiaires retardent leur recours aux soins, ils pourront faciliter la propagation de certaines pathologies transmissibles, comme la tuberculose ou l’hépatite B ». Sans résultat.

L’institut de veille sanitaire tire à nouveau la sonnette d’alarme. Un membre du gouvernement finira peut-être par l’entendre.

Jonathan Ardines