France. Risque terroriste ou coup médiatique ?
La garde à vue des dix-sept personnes interpellées lors d’une vaste opération menée par la police vendredi dans les milieux « islamistes » a été prolongée. Le gouvernement les soupçonne de préparer un « enlèvement », l’opposition dénonce une « opération électoraliste ». (Photo AFP)
Vendredi, dix-sept personnes présumées « islamistes radicaux » ont été arrêtées lors d’un coup de filet opéré à Toulouse, Marseille, en Ile-de-France, dans le Gard et autour de Nantes et Lyon. Lors de cette opération, « beaucoup d’ordinateurs, des puces, de l’armement, de l’argent, 10 000 euros en petites coupures, quatre kalachnikovs, huit fusils, sept ou huit armes de poing, un taser, des bombes lacrymogènes et un lot impressionnant de kalachnikovs à Marseille » ont été saisis selon Bernard Squarcini, le parton de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI).
Forzane Alizza dans le viseur
Le directeur de la DCRI a expliqué que l’enquête ciblait Forzane Alizza (Les Cavaliers de la Fierté), un groupuscule salafiste radical qui avait été dissous en février à la demande du ministre de l’Intérieur.
Son porte-parole, Mohamed Achamlane, a d’ailleurs été arrêté lors de l’opération. Selon M. Squarcini, les membres de ce « groupe constitué d’une véritable dangerosité » continuaient « à suivre un entraînement physique et recherchaient des armes ». Il a même rajouté que le groupe « semblait préparer un enlèvement et avait l’idée de faire le jihad (guerre sainte) en France ».
La garde à vue des dix-sept personnes interpellées a été une nouvelle fois prolongée hier dimanche selon des sources judiciaires. Placées dans le cadre d’une information judiciaire pour association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorismes, elles peuvent durer jusqu’à mardi matin, soit quatre jours, le maximum autorisé.
En fonction des charges retenues, certains pourraient être présentés aux trois juges antiterroristes chargés du dossier, Nathalie Poux, Laurence Le Vert et Marc Trévidic. Mais selon les dernières informations, une grande partie des armes retrouvée était hors d’usage, de quoi mettre du plomb dans l’aile de l’accusation de terrorisme.
« Une opération électoraliste »
Une semaine après la mort de Mohamed Merah, l’opération fleurait bon le coup médiatique. L’opposition s’est engouffrée dans la brèche dénonçant une « opération électoraliste ». Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre de l’Intérieur et soutien de François Hollande a parlé d’une « instrumentalisation ».
Le refus du gouvernement de laisser le Sénat auditionner les chefs de services du renseignement après les tueries de Montauban et Toulouse a donné du grain à moudre aux membres de l’opposition.
Face à cette polémique naissante, le président Sarkozy en personne est monté au créneau. Il a déclaré que ces arrestations n’étaient « pas liées » au dossier Merah mais n’a pas caché qu’il « existe un contexte ».
Claude Guéant et Bernard Squarcini ont multiplié les interviews pour se dédouaner. « On bosse depuis octobre sur eux », a affirmé le directeur de la DCRI. Le ministre de l’Intérieur a déclaré que les saisies « confirment le caractère dangereux » du groupe Forzane Alizza.
De son côté, l’avocat de Mohamed Achamlane, le leader du groupe, a balayé d’un revers de la main « toute intention terroriste » de son client. « Il conteste fermement avoir un quelconque lien avec Mohamed Merah et dénonce la tentative de récupération médiatique et politique orchestrée en pleine période électorale », a déclaré Me Benoit Poquet.
Jonathan Ardines