France – Primaire : un débat policé
La confrontation idéologique tant attendue entre Martine Aubry et François Hollande n’a pas eu lieu. La maire de Lille, plus agressive, a essayé de déstabiliser son rival sans jamais le pousser dans ses derniers retranchements. De son côté, le député de Corrèze a gardé sa ligne directrice, rassembler autour de sa candidature et s’imposer comme le candidat du renouveau socialiste.
Quelques oppositions sur le fond
Le premier vrai « clash » de la soirée a porté sur l’éducation, et sur le nombre de postes d’enseignants à créer. « Tu veux 60 000 fonctionnaires, c’est bien 2,5 milliards d’euros ? », questionne Martine Aubry. François Hollande ne flanche pas et évoque « le coût du redoublement » qu’il souhaite supprimer pour récupérer ces 2,5 mds. « Ça veut dire qu’on retire par ailleurs des professeurs qu’on veut rajouter », avance-t-elle.
Sur la réforme des retraites, on les annonçait en désaccord, mais ça ne s’est pas senti. La candidate a bien fait référence à une prise de position d’un proche de François Hollande, Pascal Terrasse, qui aurait évoqué « un passage légal de départ à 65 ans ». « Tu as dû mal comprendre », lui a répondu tout sourire son adversaire. Fin du quiproquo.
Thème plus attendu, le cumul des mandats. Martine Aubry l’a souvent attaqué sur ce sujet durant sa campagne. Rebelote hier mercredi. « Moi, j’ai un principe incontestable, je respecte les décisions de mon parti », a répondu Hollande, en référence à la règle de non-cumul établi par le P.S. pour l’après 2012. « Puis-je être plus clair ? », questionne-t-il. « Oui, je le pense », répond du tac au tac sa rivale.
Lancer de piques
Martine Aubry, en retard de 9 points après le premier tour n’avait d’autre choix que d’attaquer, elle n’hésite pas : « J’ai dit et je le redis, face à une droite dure, il ne faut pas une gauche molle ». Hollande réplique immédiatement : « Je ne sais pas ce que c’est que la gauche dure. Je n’en ai pas envie après cinq ans de présidence brutale ». Il souhaite une « gauche solide », pas une « gauche sectaire ».
Elle a souvent mis en avant son expérience gouvernemental, évoquant son passé de « ministre ». Un moyen de mettre le doigt sur l’inexpérience ministérielle de son adversaire. D’ailleurs, elle en profite pour le tacler sur son « contrat de génération ». Rayant cette proposition qui consiste à « payer » l’employeur, l’ex-ministre de l’Emploi est formelle : « Tu n’auras pas d’accord, les syndicats sont contre, ça ne marche pas ».
François Hollande rappelle qu’il a été « candidat à l’âge de 26 ans » avant de souligner que « lui » a remporté des circonscriptions qui ne lui étaient pas offertes. Un tacle à peine voilé à Martine Aubry souvent taxée d’avoir été parachutée à la mairie de Lille pour succéder à Pierre Mauroy, grande figure de la gauche.
Derniers appels de phares aux indécis
Interrogés sur les questions posées par Arnaud Montebourg, les deux candidats ont tout tenté pour s’attirer le vote de ses électeurs. Sur ses thèmes de prédilection, comme le protectionnisme européen ou l’encadrement des banques, Martine Aubry a évoqué les « dégâts du libre échange » rappelant sa proposition de « juste échange ». François Hollande s’est dit favorable à « l’économie ouverte, pas l’économie offerte » et a évoqué « une réciprocité » dans les échanges internationaux.
Chacun a tenté de convaincre les indécis, sans jamais tomber dans l’agressivité. Aubry s’est montrée offensive, Hollande s’est voulu rassembleur. Le clap de fin en fut l’illustration. Il a rappelé qu’il souhaitait incarner « une présidence solide, qui puisse être solidaire et respectueuse ». Elle l’a revendiqué aussi sans oublier un dernier tacle au passage : « On a confiance en moi parce que je ne change pas de position. La solidité, c’est aussi la clarté ». Et Hollande de conclure : « Chacun a son expérience et sa clarté, ce sera mesuré dimanche ».
Jonathan Ardines