France. Les rémunérations dans les entreprises publiques dans la ligne de mire du gouvernement

 France. Les rémunérations dans les entreprises publiques dans la ligne de mire du gouvernement

Pierre-Henri Gourgeon (à droite)


L’État actionnaire se rebiffe et vote contre les primes de départs de deux grands patrons. Pierre-Henri Gourgeon, ancien directeur général d’Air France-KLM, et Jean-Paul Herteman, PDG de Safran, ont ainsi vu leurs demandes refusées par une majorité d’actionnaires imitant les représentants de l’État.


 


L’État mène la fronde des actionnaires d’Air France-KLM


Chez Air France-KLM, une résolution attribuant une prime de 400 000 € à Henri Gourgeon, ancien DG du groupe a été bloquée en conseil d’administration par 78,8 % des voix des actionnaires (contre 19,44 % en sa faveur et 1,76 % d’abstention). Cette somme était prévue par une clause de non-concurrence et est venue s’ajouter à la prime d’un million d’euros prévue au moment du départ de celui-ci.


Le ministre de l’Économie et des Finances, Pierre Moscovici, avait réaffirmé qu’aux yeux du gouvernement, cette prime n’allait « pas dans le sens de la décence » et que l’État, actionnaire à 15,8 % d’Air France-KLM, s’opposerait à sa validation.


Malgré l’hostilité du conseil, le dirigeant actuel du groupe, Jean-Cyril Spinetta a défendu une clause « décidée de façon raisonnable, de bon droit » selon lui. Il a même fait l’objet de huées en ajoutant que le paquet de 1,5 million d’euros, incluant les 400.000 euros, avait été accordé pour « compenser le caractère imprévisible » du départ de M. Gourgeon.


Cependant, la somme a déjà été versée à son bénéficiaire, qui n’a aucune obligation légale de la restituer. Le ministre a donc appelé l’ancien patron du groupe à rembourser cette somme au nom de la « morale ». La fermeté de la nouvelle équipe gouvernementale intervient alors que la compagnie traverse de graves difficultés et que son cours de Bourse a perdu 70 % de sa valeur en un an.


 


Nécessité d’une révision de la politique de rémunération des patrons des entreprises publiques


Autre entreprise, même scénario. L’État a mis en échec l’attribution d’une retraite-chapeau au PDG du groupe de Défense Safran, dont il détient 30 % des droits de vote. De même, la fixation à deux ans de salaire au plus son éventuelle indemnité de départ en cas de licenciement a été refusée.


La modération dans la rémunération des dirigeants des entreprises publiques était une promesse de campagne de François Hollande. Le candidat socialiste avait notamment promis un écart maximal de 1 à 20 entre le salaire le plus faible et le plus élevé d’une entreprise.


Le gouvernement doit ainsi dévoiler dans quinze jours une nouvelle doctrine en la matière. Mais, un expert pointe déjà les difficultés du calcul du nouveau salaire des patrons parce que « cela n’aurait aucun sens de le comparer à un apprenti tout juste embauché ».


Reste aussi à savoir comment l’État pourra peser dans les entreprises où il est actionnaire minoritaire, voire marginal. Une idée s’esquisse, mais qui ne repose que sur le bon vouloir des intéressés : encourager les dirigeants concernés à imiter le gouvernement qui a réduit sa rémunération de 30 %.


 


Rached Cherif