France. Le contrôleur général des prisons souhaite une amnistie pour les « peines légères »

 France. Le contrôleur général des prisons souhaite une amnistie pour les « peines légères »

Jean-Marie Delarue


Dans un avis publié au journal officiel et repris par l’AFP, le contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGPL) plaide ce mercredi pour une loi d’amnistie des peines « très légères » prononcées avant 2012 et non exécutées.


 


Des peines non appliquées faute de moyens


La mesure d’amnistie proposée par le contrôleur général des prisons devrait désengorger les prisons et éviter d’aggraver la surpopulation carcérale qui atteint, à ses yeux, un niveau inquiétant. Pour le CGPL, Jean-Marie Delarue, ces peines non exécutées sont le fait d’un manque de « moyens nécessaires donnés aux greffes ». Il prône en outre une réflexion de long terme sur la politique pénitentiaire.


Dans une interview au quotidien 20 minutes mercredi, il précise que cette amnistie pourrait concerner « les peines de moins de six mois de prison et celles qui ont été prononcées il y a plus de deux ans ». Elle permettra de résorber le stock de milliers de peines de prison en attente d’exécution.


 


Nombre de détenus record dans les prisons françaises


Après une tendance à la baisse dans les années 2009-2010, le nombre de détenus a battu ces derniers mois plusieurs records historiques. Il a atteint 67.073 prisonniers au 1er mai, soit une surpopulation carcérale de 117,3 %.


Cette inflation est due aux consignes du précédent gouvernement visant une application plus stricte des peines prononcées. Il encourage donc la nouvelle majorité à changer la donne puisque la gauche avait voté contre la loi sur l’exécution des peines adoptée peu de temps avant l’élection présidentielle.


La politique judiciaire plus sévère (avec notamment les peines planchers) et la politique carcérale stricte ont conduit en prison des personnes « que l’on n’y mettait point » auparavant, comme les auteurs d’infraction routière.


 


Un modèle inefficace pour lutter contre la délinquance et favoriser la réinsertion


Dans son avis, le CGPL condamne l’effet contre-productif de l’application des peines légères avec des années de retard. Celle-ci « a pour résultat de ruiner l’insertion de ceux qui, postérieurement au jugement, avaient repris vie professionnelle et relations sociales », précise le M. Delarue.


Celui-ci plaide pour une réflexion de fond sur l’efficacité de la prison au regard de l’infraction commise, sur le recours à la détention provisoire et la réalité de la prison. La détention génère aussi des effets à long terme. Elle est notamment facteur de récidive en raison de la promiscuité et des conditions de vie inadaptées dues à la surpopulation carcérale.


 


Réaction hostile à droite et réponse du gouvernement


Dans un communiqué, Bruno Beschizza, secrétaire national de l’UMP en charge des questions de sécurité, redoute que l’avis du CGPL n’annonce « un projet de loi caché », signe de la « politique pénale laxiste d’une gauche permissive ». « Soit le gouvernement souhaite lancer un signal à un électorat, soit le gouvernement a un projet de loi caché qui amnistie les courtes peines », juge-t-il.


Tout en affirmant que « le gouvernement est à l’écoute de Jean-Marie Delarue quand il tire le signal d’alarme », la ministre déléguée à la Justice Delphine Batho a affirmé qu’il n’y aura pas d’amnisties pour les peines de prison, ce matin sur Europe 1.


Elle a rappelé la position du Président de la République qui avait indiqué lors de sa campagne « qu’il n’y aurait pas de loi d’amnistie ni pour les PV de stationnement, ni pour les peines de prison ». Une telle mesure pourrait être un « mauvais signal », selon elle.


Mme Batho estime que l’avis de M. Delarue est plutôt « un appel au Parlement ». Toutefois, pour remédier à court terme à cette surpopulation, la ministre n’exclut pas une loi d’amnistie « d’ici la fin d’année ».


 


Rached Cherif