France. Interview de Sabrina Benama, Front de Gauche: « Où va l’argent de la journée de solidarité ? »

 France. Interview de Sabrina Benama, Front de Gauche: « Où va l’argent de la journée de solidarité ? »

Nous discuterons de notre pré-programme avec tous les citoyens. Ce sont eux qui connaissent le mieux les réalités

Sabrina Benama, 29 ans, est candidate pour le Front de gauche dans la 1ère circonscription de la Drôme. Engagée au quotidien, la transfuge du PC (parti communiste) répond sans détour à nos questions.

 

LCDA : À 29 ans, vous êtes candidate aux élections législatives, c’est assez rare dans le monde politique. Pouvez-vous nous parler un peu de vous et de la campagne qui va démarrer en janvier ?

Sabrina Benama : Je suis jeune, d’origine algérienne et de confession musulmane. Cela fait beaucoup de handicaps pour se frayer un chemin en politique. Le Front de gauche ne s’est pas posé ces questions et m’a donné ma chance.

Je ne prétends pas tout connaître en politique, je continue d’apprendre tous les jours. Mais je connais la réalité du terrain ; la précarité, je la vis, les petits boulots, les CDD. J’attends d’avoir un logement depuis des années ! Je ne suis pas là pour apporter une caution morale comme ce fut le cas avec Rachida Dati ou Fadela Amara. Chaque matin, je me lève pour aller travailler (dans le secteur associatif) comme une personne lambda.

Notre campagne va vraiment démarrer à partir du 17 janvier. Une première assemblée citoyenne sera organisée puis des cafés citoyens chaque semaine. Nous discuterons de notre pré-programme avec tous les citoyens. Ce sont eux qui connaissent le mieux les réalités, il nous a semblé normal qu’ils puissent apporter des modifications ou des nouvelles propositions de loi. Nous allons donc travailler avec eux et défendre un programme qu’ils auront choisi.

 

Chômage, logement… la précarité gagne du terrain chez les jeunes. Comment faire pour lutter contre ce problème récurrent ?

D’abord, il faut mettre en place une éducation et une formation de qualité pour tous, l’un ne va pas sans l’autre. Jusqu’à 18 ans, la scolarité doit être gratuite pour inciter les jeunes à ne pas décrocher. Nous devons mettre un terme à tous les contrats précaires, et pousser les employeurs à embaucher en CDI.

De plus en plus de jeunes ne parviennent pas à trouver de logement. Il est indispensable de fournir une réelle aide pour trouver leur premier appartement mais aussi pour qu’ils puissent s’installer.

N’oublions pas tous ceux qui ne peuvent pas se payer une mutuelle. Tout le monde doit y avoir droit. Il suffit de mieux utiliser les richesses. Où va l’argent de la journée de solidarité que nous payons chaque année ? Je me le demande…

 

Avec le trou de la sécurité sociale qui se creuse de plus en plus, quelles sont les clés pour continuer d’offrir une couverture maladie aux plus démunis sans plonger le pays dans le déficit ?

Le trou de la sécurité sociale peut être comblé. Il suffit d’avoir une meilleure répartition des richesses. Enlevez juste 1 000 euros à chaque membre du gouvernement sur sa paye, je vous laisse faire le calcul. Ceux qui gagnent beaucoup d’argent doivent être plus taxés que les autres.

Nous ne disons pas que la crise n’existe pas, bien au contraire. Mais nous nous inquiétons du virage voulu par le gouvernement pour notre société. Ils ferment des hôpitaux, des crèches… Ils coupent les aides pour les personnes âgés et les personnes à mobilité réduite. Ces gens se retrouvent bien souvent dans le désarroi avec de petites retraites qui ne leur suffisent plus. Pour aller en maison de retraite, il faut payer des fortunes tous les mois, vous trouvez ça normal ?

Nous voulons un remboursement à 100 % des médicaments. Une aide immédiate face à la perte d’autonomie des personnes âgés et des handicapés. Notre protection sociale doit être sauvegardée et améliorée, non pas détruite comme est en train de le faire le gouvernement.

 

Comment en finir avec les discriminations à l’embauche, au logement… ?

J’ai vécu cette discrimination à l’embauche, et je peux vous dire qu’elle existe toujours. Il suffit de parler avec les gens dans les quartiers pour s’en rendre compte. En ce moment, les premières victimes sont les Maghrébins.

Pour changer les choses, il faut que les mairies et les collectivités se diversifient, qu’il y ait du personnel de cultures diverses. Il faut en finir avec les photos sur les CV, c’est une aberration. Avec plus de diversité dans les mairies, qui joueraient un rôle d’exemple, je suis persuadée qu’il y aurait moins de discriminations.

Il faut que chacun y mette du sien, c’est ensemble qu’on pourra changer les choses.

Propos recueillis par Jonathan Ardines