France – Des SMS pour lutter contre le contrôle au faciès

 France – Des SMS pour lutter contre le contrôle au faciès

Soprano et d’autres rappeurs français ont accepté de participer à la campagne du collectif Contre le contrôle de faciès. DR.

Le collectif « Contre le contrôle au faciès » vient de lancer une campagne médiatique où des grands noms du rap français racontent « leur contrôle ». Pour lutter contre ce fléau, un numéro est disponible pour que les victimes puissent se faire entendre.

« Ça va au-delà du contrôle d’identité, c’est un contrôle de soumission », lance le rappeur Sefyu. Comme lui, ils sont nombreux à avoir été victimes d’un délit de sale gueule.

Le collectif  »Contre le contrôle au faciès » veut y mettre un terme. Un numéro, 07 19 60 33 81, est mis à disposition. Un texto, et la victime est rappelée dans les 24 h. Et depuis le lancement de la campagne médiatique, le téléphone n’arrête pas de sonner.

Pour mettre un coup de projecteur sur le projet, Ladji Réal, réalisateur, lui-même issu des quartiers, a décidé d’apporter ses compétences au service du collectif. Il a réalisé des courts métrages où des rappeurs comme Sefyu, La Fouine, Soprano ou Mac Tyer racontent un contrôle d’identité.

« Ça n’a pas été facile car les rappeurs étaient un peu inquiets au départ. Ils ne voulaient pas se montrer dans une position victimaire », raconte le réalisateur. Mais dès qu’ils ont compris l’intérêt de l’action, ils ont dit banco.

Désormais un clip est diffusé sur le site chaque lundi et jeudi. Le choix des rappeurs ne s’est pas fait au hasard, il « fallait toucher la population victime de ses contrôles » explique Ladji. Une étude récente du CNRS pour l’ONJI intitulé  » Police et minorités visibles : les contrôles d’identités à Paris » va dans ce sens.

On y apprend que ceux perçus comme des  »jeunes » sont contrôlés 11 fois plus que les autres. Les  »noirs » et les  »arabes » ne sont pas mieux lotis avec 6 fois plus de contrôle que les  »blancs » pour les premiers et 8 fois plus pour les maghrébins.

Mettre en place un reçu du contrôle

Depuis 8 mois, artistes, politiques, avocats qui composent le collectif ont attenté une action en justice. Chaque contrôle au faciès est noté et une plainte est déposée. Le collectif espère que cette action aura un retentissement judiciaire et médiatique sans précédent.

Pour mobiliser un maximum de monde, des maraudes sont organisées un peu partout sur le territoire. Par groupe de 2 ou 3, des membres du collectif vont à la rencontre des gens pour les sensibiliser et leur expliquer qu’ils peuvent faire bouger les choses.

« Nous ne voulons plus que les policiers fassent ce qu’ils veulent sans avoir à rendre de compte » prévient Ladji. Le collectif veut s’inspirer de ce qui se fait aux Etats-Unis, en Angleterre ou en Espagne, avec un reçu du contrôle d’identité.

Les policiers doivent marquer l’heure, la date, le motif du contrôle et surtout il est co-signé par les personnes contrôlés qui peuvent donner leur avis.

« Cela pourrait tout changer, les contrôles ne seraient plus motivés par l’apparence mais par le comportement. Ils seront ainsi plus efficaces et permettront d’établir de meilleures relations entre la police et la population », détaille le réalisateur.

« Casser les murs qui séparent la police et les jeunes »

Alors que de nouvelles vidéos mettant en scène des rappeurs vont arriver, c’est au tour des anonymes de faire leur entrée.

Après le coup médiatique, le collectif laisse la place aux autres, ceux qui vivent cette discrimination au quotidien, étudiant, comédien, avocat, femme de ménage vont témoigner devant la caméra. « Un moyen de toucher toute la population », explique Ladji.

En attendant, les maraudes continuent et des séances de formations sont déjà à l’étude. En collaboration avec des syndicats de police, les membres du collectif veulent aller dans les collèges et lycées pour indiquer la marche à suivre mais aussi casser les murs qui séparent la police des jeunes. « Il faut mettre à mal la défiance qu’ont les jeunes envers la police », annonce Ladji Réal.

Un premier pas avant de réussir à modifier définitivement l’article 78.2 qui encadre le contrôle et en finir avec la première des discriminations.

Jonathan Ardines