France. Bettencourt a-t-elle financé la campagne de Sarkozy ?
Cette affaire est une « boule puante ». Voilà comment le président Sarkozy a qualifié hier mardi sur canal+ les soupçons de financement illégal de sa campagne 2007 par l’héritière L’Oréal. L’express a pourtant révélé que le président était bien venu voir la milliardaire deux mois avant l’élection. (Photo AFP)
« Comme toujours avant la présidentielle, il y a un certain nombre de boules puantes, c’est classique, ça ne surprend personne, ce n’est pas pour autant que c’est avéré », s’est défendu Nicolas Sarkozy hier mardi sur le plateau de la matinale sur canal +.
Interrogé sur une affaire qui le rattrape à la vitesse d’un cheval au galop, le chef de l’État a tenu à mettre les choses au clair. « Je voudrais dire une chose sur les comptes de ma campagne de 2007, ils n’ont été contestés par personne. La commission des comptes de campagne a certifié ces comptes en disant : « il n’y a pas un centime dont on se demande d’où il vient, il n’y a pas une dépense dont on se demande par qui elle a été financée » ». À l’écouter, il n’y a rien à dire, tout a été fait dans la plus grande transparence.
« Le Conseil constitutionnel a confirmé ces comptes. Ces comptes de ma campagne de 2007 sont tellement exacts que personne n’y a trouvé à redire, il n’y a pas eu un contentieux. C’est d’ailleurs une des premières fois parce qu’en général, la campagne d’Édouard Balladur, la campagne de Jacques Chirac, campagne des uns, campagne des autres… », a-t-il rajouté.
Une visite qui interpelle
C’est le journal L’Express qui lâché l’information. Lundi, l’hebdomadaire révélait qu’une mention dans l’agenda de Liliane Bettencourt à la date du 27 février 2007 faisait référence à une rencontre entre Nicolas Sarkozy, alors en campagne, et son mari.
« Je ne sais pas ce que je faisais il y a cinq ans », a déclaré le candidat avant de reconnaître qu’il était « bien sûr » possible qu’il ait rencontré André Bettencourt en février 2007. « Quel est le problème, quelle est l’histoire, quelle est l’information ? », a-t-il questionné.
Selon lui, les rencontres avec André Bettencourt étaient fréquentes : « André Bettencourt habitait Neuilly, il a été sénateur pendant que j’étais député, il était dans la majorité, la même que la mienne, jusqu’à présent, monsieur Bettencourt, c’était un délinquant ? », a-t-il ironisé.
Des indices qui jettent le trouble
L’information de l’Express n’est pas la seule qui intéresse la justice. Deux retraits de 400 000 euros chacun, effectués depuis les comptes suisses de Liliane Bettencourt en février et avril 2007 en pleine campagne électorale, posent question.
La justice s’étonne que, deux jours plus tard, le 5 février 2007, un rendez-vous ait eu lieu entre Patrick de Maistre, l’ancien homme de confiance de la milliardaire et Éric Woerth, le trésorier du candidat Sarkozy à l’époque.
De Maistre, incarcéré depuis le 23 mars et interrogé à plusieurs reprises n’a jamais reconnu un tel financement. Mais la décision de la justice de le maintenir en détention a mis le feu aux poudres. Manuels Valls, porte-parole de François Hollande, avait déclaré que le pays était « aux portes d’un scandale d’État ». Le maire de Nantes, Jean-Marc Ayrault, un proche du candidat PS a commenté cette affaire à son tour. Pour lui, « il y a sans doute derrière des faits graves, de fraude fiscale à l’évidence ».
La justice a là une affaire délicate. L’argent retiré en Suisse a-t-il permis au candidat Sarkozy de financer sa campagne de 2007 ? En tout cas, hier, le gendre de l’héritière de l’Oréal a assuré que la famille n’avait pas perçu « un centime » à l’époque.
Alors où cet argent a-t-il bien pu passer ?
Jonathan Ardines