Football. Ben-Hatira : de la Mannschaft aux Aigles
A l’été 2009, Änis Ben-Hatira remportait l’Euro Espoirs avec l’Allemagne, aux côtés de Mesut Ozil et Sami Khedira. Depuis, la carrière de ce fils de Tunisien né à Berlin, n’a jamais décollé, à l’inverse de celle de ses ex coéquipiers. Resté à quai, il vient de répondre positivement à l’appel des Aigles de Carthage. Pour reprendre son envol ?
La Tunisie vient-elle de trouver le grand milieu de terrain organisateur qui lui faisait défaut ? Alors qu’Oussama Darragi a traversé la CAN en fantôme, et que Yassine Chikhaoui joue trop souvent en sourdine, Sami Trabelsi vient de convoquer Änis Ben-Hatira, talentueux jeune homme de 23 ans.
Depuis ses débuts en Bundesliga en 2007, le CV du joueur du Hertha Berlin ne suggère certes pas le phénomène, mais son passé avec les catégories inférieures de la Mannschaft certifie un potentiel, encore insuffisamment exploité.
Flash-back. Eté 2007. Numéro 10 dans le dos, Änis Ben-Hatira ordonne le jeu de l’équipe d’Allemagne lors de l’Euro moins de 19. Plus encore que Mesut Ozil et Sami Khedira, ses coéquipiers surdoués, Ben-Hatira braque les projecteurs sur sa personne. Lors de la demi-finale perdue dans les derniers instants face à la Grèce (2-3), le joueur né à Berlin, inscrit les deux buts des siens.
Il termine le tournoi en co-meilleur buteur, avec trois réalisations à revendiquer. Deux ans plus tard, il est sacré champion d’Europe Espoirs. Mais alors que Mesut Ozil et Sami Khedira joueront la Coupe du Monde 2010, avant de rejoindre le Real Madrid, Ben-Hatira patine.
Relégué en équipe B, à Hambourg
Passé pro en 2007 avec Hambourg SV, l’un des clubs allemand les plus puissants, le milieu offensif n’est jamais parvenu à s’y imposer. Dans un premier temps, il dispose de circonstances atténuantes.
Lors de la saison 2007-2008, il doit batailler pour une place de titulaire avec Rafael Van der Vaart, Piotr Trochowski, et Mohamed Zidan. Logiquement, devant cette rude concurrence, ses apparitions sont extrêmement éparses (trois au total). Les départs de Van der Vaart et Zidan à l’inter-saison ne vont cependant rien changer à l’affaire : Ben-Hatira accumule les minutes sur le banc.
Quand un jeune espoir voit sa progression freinée, il opte fréquemment pour un passage à l’étage inférieur afin de retrouver du temps de jeu. Une solution adoptée par ce fils d’un père tunisien. Début 2009, Ben-Hatira se fait prêter à Duisbourg, club de Bundesliga 2, la deuxième division allemande. Il y restera un an et demi, et se fera une place dans l’équipe-type.
Suffisant pour convaincre Hambourg de compter sur lui ? Pas vraiment. Déjà, à l’été 2009, le jeune homme né à Berlin avait tenté un retour dans la ville hanséatique, mais il avait été relégué dans l’équipe B. Un an plus tard, le même sort l’attend.
Cette fois, les blessures en série qui amputent l’effectif du HSV vont finir par l’aider à retrouver les rangs de l’élite. Sa saison est ponctuée de dix-huit apparitions. Ben-Hatira progresse, mais Hambourg ne voit toujours pas en lui le pendant d’un Ozil. A l’inter-saison, le joueur aux racines tunisiennes s’engage avec le club phare de sa ville natale, le Hertha Berlin.
Il avait décliné une sélection chez les Aigles
Les cas de joueurs ayant brillé en catégories de jeune et à n’ayant pas réussi à s’imposer une fois passés professionnels sont aussi nombreux que les raisons de ce cap non franchi. Reste que pour Ben-Hatira, le temps de faire le deuil d’une carrière à haut-niveau n’est pas encore venu. Son exquise vision de jeu est intacte, comme cette frappe de balle incisive.
En mars 2011, son talent l’avait conduit à être appelé une première fois par les Aigles. Il avait alors décliné l’invitation, assurant vouloir être titulaire en club avant de s’engager avec la Tunisie. Finalement, à l’automne, il a effectué les démarches pour changer de nationalité sportive, avant de répondre positivement à l’appel de Sami Trabelsi cette semaine.
Au Hertha Berlin, en lutte pour le maintien à la quinzième place de Bundesliga, Ben-Hatira n’a pourtant rien d’un titulaire. Il a été intégré dans le onze de départ à seulement trois reprises, cette saison. Mais à 23 ans, il sait qu’il ne peut plus se permettre d’attendre.
Mercredi prochain, le match amical opposant la Tunisie au Pérou pourrait constituer pour lui une occasion de se relancer. De rappeler qu’il fit partie de l’élite de sa génération.
Thomas Goubin