Entre Egypte et Israël, le torchon brûle

Malgré le tour de vis opéré par l’Egypte par le renforcement des rondes de police et de l’armée dans le nord-Sinaï pour protéger le pipeline, rien n’y fait. Dans la nuit du lundi 26 septembre, le gazoduc livrant du gaz égyptien à Israël et à la Jordanie a été partiellement détruit par une explosion. Des hommes armés ont ouvert le feu contre les installations gazières.

C’est la sixième fois que le gazoduc est attaqué en sept mois depuis le renversement de l’ancien président Hosni Moubarak causant l’interruption du pompage du gaz vers ces deux pays. Israël importe d’Egypte plus de 43% du gaz utilisé dans le pays.

Plusieurs sabotages et tentatives d’attentat avaient été auparavant évités. Le 16 août dernier, quatre hommes armés avaient été arrêtés alors qu’ils s’apprêtaient à faire exploser un terminal gazier près d’al-Arish.

Depuis le renversement du « rais », le 11 février, les relations bilatérales entre Israël et l’Egypte, son premier allié dans le monde arabe, ne cessent de virer au rouge. Les raisons ne manquent pas :

D’abord, les contrats gaziers de plus en plus controversés sont devenus source de conflit dans la nouvelle Egypte postrévolutionnaire. Plusieurs anciens responsables, hommes d’affaires, ainsi que Moubarak lui-même sont accusés de corruption en rapport avec ces contrats de vente. Des enquêtes sont ouvertes pour définir la responsabilité de chacun et laissent entrevoir une révision des accords jugés démesurément favorables à Israël. Des formations islamistes sont allées jusqu’à demander l’arrêt des livraisons.

Ensuite, la mort de six policiers égyptiens tués le 18 août par l’armée israélienne, qui poursuivait des auteurs présumés d’attaques près de la frontière avec l’Egypte, n’a fait que jeter l’huile sur le feu.

Et pour finir, la récente attaque par des Egyptiens contre l’ambassade israélienne le 9 septembre dernier où des centaines de manifestants en colère, armes blanches au poing ont abattu le mur de béton à coups de marteau. L’ambassadeur Yitzhak Levanon avait dû quitter l’Egypte dans la précipitation.

Autant d’éléments qui font dire aux observateurs à l’unanimité qu’entre l’Egypte et Israël, rien ne sera plus comme avant.

Le premier ministre Essam Charaf, cédant sans doute à la pression populaire grandissante, avait indiqué récemment que le traité de paix n’était « pas quelque chose de sacré et peut subir des changements ». L’Egypte étant le premier pays arabe à avoir conclu un accord de paix avec l’Etat hébreu, en 1979.

Le gouvernement israélien poursuivant sa politique de provocation, récemment le feu vert a été donné pour la construction de 1.100 nouveaux logements dans un quartier de colonisation à Jérusalem-Est, se voit critiqué avec de plus en plus de virulence par les amis d’hier ; l’Egypte mais également la Turquie.

Cela étant, jusqu’où Le Caire est-il en mesure de céder aux revendications populaires et à mettre la pression sur son « arrogant » voisin, lui qui perçoit de Washington une rente annuelle s’évaluant à des milliards de dollars ?

Soufia Limam