Ennahdha vient à la rencontre des Tunisiens à Paris

Mercredi après-midi dans une petite salle parisienne, le parti Ennahdha a dévoilé les grandes lignes de son programme. Sérieux et appliqués, ses dirigeants ont répondu aux questions des journalistes présents. Avec en point d’orgue, la place qu’ils vouent à la religion dans la Tunisie de demain.

Pour les Tunisiens de France

« Les bi-nationaux doivent avoir un rôle actif et créatif. Nous voulons les inciter à venir s’implanter en Tunisie si ils ont un projet sérieux, » explique Mme Mehrézia Labidi, seconde sur la liste France-Nord.

L’éducation sera une priorité, notamment pour les familles venues élever leurs enfants en France, avec un slogan « Un bac pour chaque Tunisien ». Objectif, organiser un accompagnement éducatif pour tous.

Point important, la création d’un ministère pour les Tunisiens vivant à l’étranger. Un moyen selon elle « d’aider chaque citoyen tout en tentant de vaincre les tracas administratifs ».

Sur la question des clandestins, brûlante en ce moment, le parti souhaite aller vers « une prise en charge dans le respect tout en oeuvrant pour une insertion réussie ». Même si ses dirigeants se prononcent pour « un meilleure encadrement de l’immigration légale ».

La nouvelle Tunisie

« Nous voulons une Tunisie libre qui extirpe les racines de la dictature » annonce fièrement M. Ameur Larayed, tête de liste sur la circonscription.

Trois priorités pour eux, le social, l’économie et la culture. Le parti lance ses première banderilles.

« Lutter contre l’abandon des études en augmentant le nombre de bourses » lance Karima Tagaz, la benjamine de la liste, chargée de la culture et de la jeunesse. Créer un musée national, des salles de cinéma et de théâtre.

Très bien tout ça, mais avec quel argent ?

Pour Karim Azzouz, directeur de campagne : « Nous devrons payer la dette extérieure du pays. Nous allons faire un audit pour obtenir les meilleures conditions de crédit » avant de détailler le programme économique : « Il faut libérer la croissance et soutenir les plus défavorisés. Tout d’abord relever le seuil de non-imposition de 1500 à 2500 dinars par an ». Selon lui, cette simple mesure permettra d’augmenter les revenus de 5 à 10 % pour 10 à 20 % de la population. Pour la rendre économiquement viable : « Il suffit de mieux encadrer l’encaissement des impôts, nous avons 40 % de fraude fiscale à travers le pays, » assure-t-il.

Avant de donner quelques objectifs en vrac. Dans les 5 ans, élever la croissance de 7 % et créer 590.000 emplois. Attirer les investisseurs étrangers et créer une économie social et solidaire inexistante en Tunisie. Il l’affirme : « C’est un gisement d’emplois, regardez en France ! »

Ambiguïté autour de l’Islam et des alliances

« La seule référence directe que nous avons à l’Islam dans notre programme : maintenir le 1er article de la constitution » annonce Mehrézia Labidi avant d’enchaîner : « Mais nous respecterons toutes les religions ».

Ils l’assurent d’une même voix, il n’y aura ni charia ni obligations religieuses. « Nous garantissons aux femmes tunisiennes leur liberté. Les acquis seront respectés et ne seront pas touchés » rajoute-t-elle.

Avant de rappeler que beaucoup de Tunisiens les rejoignent sur leur « référence à l’Islam ». Juste des principes de solidarité et de liberté selon eux. En tout cas pas de République laïque dans le texte.

Pas de réponse claire non plus concernant les alliances futures, même si on reconnaît à demi-mot « des pourparlers en cours ». Si coalition il y a, elle se fera en fonction des résultats.

L’élection présidentielle serait-elle en ligne de mire ?

Jonathan Ardines