En France, remises en cause de la double nationalité

«Les récentes révolutions qui ont secoué le monde arabe, au delà du désir de liberté, ont révélé des difficultés liées au problème de la double nationalité en France». C’est en ces termes que Marine Le Pen, présidente du FN, a introduit sa requête dans une lettre adressée à l’ensemble des députés siégeant à l’assemblée nationale, le 30 mai 2011. Et de poursuivre son raisonnement : «Vous le savez, l’État et la nation sont en France indissociables. C’est en effet du sentiment d’appartenance à une même nation que l’État tient notre pays sa légitimité. Lorsque la solidarité nationale est atteinte, c’est l’autorité de l’État qui se délite. La multiplicité des appartenances à d’autres nations contribue aujourd’hui, et d’une manière de plus en plus préoccupante, à affaiblir chez nos compatriotes l’acceptation d’une communauté de destin, et par-là même à miner les fondements de l’action de l’État».

Ni le thème ni le discours et encore moins le lexique de cette lettre ne choquent de la part d’un membre de ce parti. Or, le FN n’est pas le seul mouvement politique à soumettre l’idée d’une réforme du code de la nationalité. Trois députés du collectif de la Droite populaire avaient déposé en septembre 2010 un amendement allant dans ce sens qui avait été rejeté : «L’acquisition de la nationalité française est subordonnée à la répudiation de toute autre nationalité». «Toute personne qui possède la nationalité française et une autre nationalité et qui ne renonce pas à cette autre nationalité dans les six mois précédant sa majorité et dans les douze mois la suivant, perd la nationalité française», proposait l’amendement.

Sujet de débat

Si le thème de la binationalité n’est pas nouveau du côté du FN, il préoccupe également le parti de la majorité. En mai dernier, le député-maire UMP Claude Goasguen expliquait dans le journal La Croix qu’il souhaitait «une limitation des pouvoirs politiques» parce qu’«il est tout de même gênant qu’une personne puisse voter en France et dans un autre État». Pour lui, il faut «enregistrer les situations de binationaux» afin de constituer un registre et aller vers une «limitation de la double nationalité». Jean-François Copé, président de l’UMP, et Henri Guaino, conseiller de Nicolas Sarkozy, ne s’opposent pas à ce débat mais préfèrent le repousser à juillet lors de la convention sur l’immigration et l’intégration prévue à ce moment-là. Pour le conseiller, la question «mérite d’être débattue».

En revanche Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, et Jeannette Bougrab, secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de la vie associative, ne partagent pas les mêmes opinions. «C’est le rejet de l’autre, de la différence, du métissage». Pour Étienne Pinte, député UMP, le but de Marine Le Pen est simple, c’est la «stigmatisation de l’étranger». «Il s’agit pour le Front national de trouver un nouveau cheval de bataille et de flatter le chauvinisme français en imposant un choix de nationalité». Pour Pierre Henry, DG de France Terre d’asile, «si on pouvait arrêter ce débat permanent autour de l’origine des personnes, on rendrait un grand service au bien-vivre ensemble».

Gypsy Allard